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Qui peut bénéficier d’une assurance-vie ?

La liberté de choix du souscripteur de l’assurance-vie : qui choisir ?

La désignation du bénéficiaire n’appartient qu’à l’assuré même si les fonds ayant servi à financer le contrat sont communs aux époux.

Il dispose d’une totale liberté pour désigner le bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie

Ainsi, le bénéficiaire peut être :

  • un majeur ou un mineur,
  • une personne physique ou d’une personne morale (société, fondation, association, etc.), 
  • un héritier ou une personne qui n’a aucun lien de parenté avec l’assuré, 
  • une personne déjà née ou une personne à naître (par exemple lorsque l’assuré désigne ses enfants nés ou à naître). 

Les incidences fiscales du choix du bénéficiaire peuvent guider l’assuré. 

En savoir plus sur les avantages fiscaux de l'assurance-vie pour transmettre son patrimoine

La possibilité du démembrement de la clause bénéficiaire : la désignation d’un bénéficiaire en nue-propriété et d’un bénéficiaire en usufruit

Le principe du démembrement de la clause bénéficiaire

Si l’assuré a la possibilité de désigner plusieurs bénéficiaires de son contrat d’assurance-vie, chacun bénéficiant d’une quote-part en pleine propriété, il peut également choisir de démembrer la clause bénéficiaire en désignant un bénéficiaire de la nue-propriété et un bénéficiaire de l’usufruit du capital devant être versé au moment de son décès.

En savoir plus sur le démembrement

L’usufruitier dispose alors d’un « quasi-usufruit » sur les sommes qui lui sont versées. Cela signifie en pratique que l’usufruitier perçoit les sommes et peut en disposer librement, à charge pour lui de restituer ces sommes (en valeur ou en nature) aux nus propriétaires (article 587 du Code civil).

Si l’usufruit comprend des choses dont on ne peut faire usage sans les consommer, comme l’argent, les grains, les liqueurs, l’usufruitier a le droit de s’en servir, mais à la charge de rendre, à la fin de l’usufruit, soit des choses de même quantité et qualité soit leur valeur estimée à la date de la restitution.

Au décès de l’usufruitier (évènement qui constitue classiquement le terme de l’usufruit), les nus propriétaires disposent d’une créance à l’encontre de la succession de l’usufruitier pour récupérer la somme objet du quasi-usufruit si elle a été consommée et ne se retrouve pas en nature dans le patrimoine du bénéficiaire usufruitier. 

En savoir plus sur l'usufruit

«

L’intérêt du démembrement de la clause bénéficiaire

Le démembrement de la clause bénéficiaire consiste souvent en la désignation du conjoint en qualité de bénéficiaire de l’usufruit et des enfants en qualité de bénéficiaires de la nue-propriété

Il présente alors un double intérêt de protection du conjoint survivant et de transmission du patrimoine aux enfants, notamment lorsque ces derniers sont issus d’une précédente union. 

En effet, le conjoint survivant bénéficie jusqu’à la fin de sa vie des sommes versées au titre du capital décès et les enfants ont, in fine, vocation à les récupérer, alors même qu’ils n’ont pas vocation à hériter de ce conjoint survivant, même dans le cas d’une famille recomposée où le conjoint survivant n’est pas leur parent ascendant. Dans ce dernier cas, le démembrement de la clause bénéficiaire poursuit alors un objectif d’optimisation fiscale et de protection des enfants du premier lit de l’assuré, qui ont, in fine, un droit sur le patrimoine de leur père.

Les cas particuliers de l’héritier renonçant et du bénéficiaire mineur

Le bénéfice d’une assurance-vie par un héritier renonçant à la succession

La renonciation à la succession par un héritier n’a pas d’incidence sur son droit à se voir verser le capital d’une assurance-vie s’il en est le bénéficiaire (article L132-8 du Code des assurances). 

«  Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l’assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.

Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

-les enfants nés ou à naître du contractant, de l’assuré ou de toute autre personne désignée ;

-les héritiers ou ayants droit de l’assuré ou d’un bénéficiaire prédécédé.

L’assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l’exigibilité.

Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession.

En l’absence de désignation d’un bénéficiaire dans la police ou à défaut d’acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu’avec l’accord de l’assuré, lorsque celui-ci n’est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.

Lorsque l’assureur est informé du décès de l’assuré, l’assureur est tenu de rechercher le bénéficiaire, et, si cette recherche aboutit, de l’aviser de la stipulation effectuée à son profit. »

En savoir plus sur la renonciation à la succession

Il est donc tout à fait possible de renoncer à ses droits dans la succession, notamment lorsque celle-ci est déficitaire ou lorsque l’héritier souhaite que ses propres héritiers le représentent dans la succession, et de demander malgré tout le versement du capital d’une assurance-vie

En savoir plus sur la représentation d'un héritier

Le bénéficiaire mineur d’une assurance-vie

L’assuré ayant la liberté de choisir le bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie, il peut désigner une personne mineure. 

Cela pose néanmoins, en pratique, des questions de gestion du patrimoine dudit mineur.

La gestion du capital perçu par le bénéficiaire mineur
La gestion par les parents

N’étant pas capable au sens juridique du terme, le mineur bénéficiaire d’un capital décès ne pourra pas disposer des sommes comme il l’entend. 

En premier lieu, ce sont ses parents, administrateurs légaux des biens appartenant à leur enfant, qui devront donc gérer ces sommes (article 382 du code civil). 

En savoir plus sur l'option successorale d'un héritier mineur

« L’administration légale appartient aux parents. Si l’autorité parentale est exercée en commun par les deux parents, chacun d’entre eux est administrateur légal. Dans les autres cas, l’administration légale appartient à celui des parents qui exerce l’autorité parentale. »

La gestion par un tiers

Le Code civil pourrait ouvrir une voie supplémentaire au souscripteur du contrat d’assurance-vie.

L’article 384 du Code civil indique en effet : « Ne sont pas soumis à l’administration légale les biens donnés ou légués au mineur sous la condition qu’ils soient administrés par un tiers ».

« Ne sont pas soumis à l’administration légale les biens donnés ou légués au mineur sous la condition qu’ils soient administrés par un tiers.

Le tiers administrateur a les pouvoirs qui lui sont conférés par la donation, le testament ou, à défaut, ceux d’un administrateur légal.

Lorsque le tiers administrateur refuse cette fonction ou se trouve dans une des situations prévues aux articles 395 et 396, le juge des tutelles désigne un administrateur ad hoc pour le remplacer. »

La question se pose donc de savoir si le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie peut soumettre le bénéfice de ce dernier à un mineur, sous réserve que le capital perçu à son décès ne soit pas administré par ses parents. 

Cela aurait, notamment, un intérêt lorsque les parents du mineur sont divorcés et que l’un des parents, souscripteur du contrat d’assurance-vie, souhaite écarter l’autre parent de la gestion du capital. 

La doctrine est divisée sur ce point et aucune réponse n’a encore été apportée par la jurisprudence. 

Certains auteurs considèrent que, le capital de l’assurance-vie n’entrant pas dans le patrimoine successoral, il n’est ni « donné », ni « légué », de sorte qu’il doit être soumis à l’administration légale des parents prévue à l’article 382 du code civil. 

« L’administration légale appartient aux parents. Si l’autorité parentale est exercée en commun par les deux parents, chacun d’entre eux est administrateur légal. Dans les autres cas, l’administration légale appartient à celui des parents qui exerce l’autorité parentale. »

En savoir plus sur l'exclusion de la valeur de l'assurance-vie de la succcession

Selon d’autres auteurs, il est possible de soutenir que le capital décès, au moins pour le montant des primes versées, constitue une donation indirecte au mineur. Il serait alors possible d’échapper à l’administration légale des parents et de désigner un tiers administrateur des sommes versées au titre de l’assurance-vie

Il existe peu de jurisprudence sur ce thème, le recours à l’article 384 du code civil étant assez rare malgré son intérêt évident. Il pourra cependant utilement être référé à la jurisprudence beaucoup plus abondante sur la possibilité de requalifier une assurance-vie en donation.

La sanction en cas de mauvaise gestion des fonds perçus par le mineur

La personne gérant le patrimoine du mineur issu du contrat d’assurance-vie dont il a été bénéficiaire doit l’utiliser dans l’intérêt exclusif du mineur. 

Toute faute de l’administrateur légal dans la gestion des biens du mineurs pourra être sanctionnée (article 386 du Code civil).

« L’administrateur légal est responsable de tout dommage résultant d’une faute quelconque qu’il commet dans la gestion des biens du mineur.

Si l’administration légale est exercée en commun, les deux parents sont responsables solidairement.

L’Etat est responsable des dommages susceptibles d’être occasionnés par le juge des tutelles et le directeur des services de greffe judiciaires du tribunal judiciaire dans l’exercice de leurs fonctions en matière d’administration légale, dans les conditions prévues à l’article 412.

L’action en responsabilité se prescrit par cinq ans à compter de la majorité de l’intéressé ou de son émancipation. »

Les parents ne peuvent donc pas dilapider les sommes versées à leur enfant sauf à être, le cas échéant, condamnés à réparer le préjudice résultant des fautes commises dans l’administration des biens du mineur. 

Comment désigner le bénéficiaire d’une assurance-vie ?

L’assuré peut théoriquement désigner le bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie sur tout support mais au risque d’une efficacité plus faible. 

En pratique, la désignation est le plus souvent effectuée grâce à la rédaction d’une clause bénéficiaire déposée auprès de la compagnie d’assurance-vie ou aux termes d’un testament. Le contentieux est fourni sur l’articulation de ces différentes méthodes de désignation.

«  Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l’assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.

Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

-les enfants nés ou à naître du contractant, de l’assuré ou de toute autre personne désignée ;

-les héritiers ou ayants droit de l’assuré ou d’un bénéficiaire prédécédé.

L’assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l’exigibilité.

Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession.

En l’absence de désignation d’un bénéficiaire dans la police ou à défaut d’acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu’avec l’accord de l’assuré, lorsque celui-ci n’est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.

Lorsque l’assureur est informé du décès de l’assuré, l’assureur est tenu de rechercher le bénéficiaire, et, si cette recherche aboutit, de l’aviser de la stipulation effectuée à son profit. »

La désignation par la rédaction d’une clause bénéficiaire

La clause bénéficiaire standard

Les clauses bénéficiaires les plus fréquemment proposées par les compagnies d’assurances-vie désignent : 

  • les héritiers dans l’ordre successoral, sans les désigner nominativement, à défaut leurs propres descendants ;
En savoir plus sur l'ordre successoral des héritiers

ou

  • le conjoint à la date du décès, à défaut les enfants vivants ou -en cas de décès de l’un d’entre eux- à ses représentants, à défaut les héritiers.
En savoir plus sur le conjoint survivant

La désignation de la qualité des bénéficiaires au lieu d’une liste nominative permet au souscripteur d’anticiper d’éventuels changement dans sa vie personnelle : 

  • désigner son « conjoint » sans le nommer évite d’avoir à modifier la clause bénéficiaire en cas de divorce ; 
  • ne pas nommer ses enfants évite de modifier la clause bénéficiaire si le souscripteur a d’autres enfants après la souscription du contrat d’assurance-vie.

En effet, l’assurance profite à la personne qui a la qualité désignée au moment du décès et non au moment de la souscription du contrat d’assurance-vie (article L132-8 du Code des assurances).

«  Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l’assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.

Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

-les enfants nés ou à naître du contractant, de l’assuré ou de toute autre personne désignée ;

-les héritiers ou ayants droit de l’assuré ou d’un bénéficiaire prédécédé.

L’assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l’exigibilité.

Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession.

En l’absence de désignation d’un bénéficiaire dans la police ou à défaut d’acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu’avec l’accord de l’assuré, lorsque celui-ci n’est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.

Lorsque l’assureur est informé du décès de l’assuré, l’assureur est tenu de rechercher le bénéficiaire, et, si cette recherche aboutit, de l’aviser de la stipulation effectuée à son profit. »

La clause bénéficiaire « à texte libre »

L’assuré peut ne pas recourir à la clause bénéficiaire standard proposée par l’assureur et rédiger lui-même la clause bénéficiaire.

Cela lui permet d’exercer totalement sa liberté de choix dans la désignation du bénéficiaire. 

L’assuré peut, ainsi :

  • désigner un bénéficiaire avec lequel il n’a aucun lien de parenté et qui n’est donc pas l’un de ses héritiers ;
  • choisir son bénéficiaire parmi ses héritiers en avantageant l’un d’eux, par exemple en raison de sa situation financière plus fragile ; 
  • désigner plusieurs bénéficiaires, qui percevront alors chacun une quote-part de l’assurance-vie, déterminée par l’assuré ;
  • désigner un bénéficiaire pour recevoir tout ou partie de la nue-propriété et un autre pour bénéficier de l’usufruit ;
  • etc.

La liberté dans la rédaction de la clause bénéficiaire du contrat d’assurance-vie est un formidable outil d’anticipation qui reste sous-utilisée en France.

Le cas particulier de la clause bénéficiaire avec charge

Le principe de la clause bénéficiaire avec charge

L’assuré a la possibilité de rédiger une clause bénéficiaire avec charge. Autrement dit, il peut soumettre le bénéfice de son contrat à l’obligation, pour le bénéficiaire, d’accomplir un acte en particulier. 

Le bénéfice du contrat d’assurance-vie est alors conditionné à l’exécution des obligations imposées par l’assuré.

La charge contenue dans la clause bénéficiaire n’est cependant valable que si elle est temporaire et justifiée par un intérêt sérieux et légitime (article 900-1 du Code civil). 

« Les clauses d’inaliénabilité affectant un bien donné ou légué ne sont valables que si elles sont temporaires et justifiées par un intérêt sérieux et légitime. Même dans ce cas, le donataire ou le légataire peut être judiciairement autorisé à disposer du bien si l’intérêt qui avait justifié la clause a disparu ou s’il advient qu’un intérêt plus important l’exige. 

Les dispositions du présent article ne préjudicient pas aux libéralités consenties à des personnes morales ou mêmes à des personnes physiques à charge de constituer des personnes morales. »

Le souscripteur peut, par exemple, imposer au bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie de réinvestir le capital en faisant l’acquisition d’un bien immobilier. Il peut aller plus loin en imposant au bénéficiaire usufruitier d’acquérir un bien immobilier, dont la propriété est alors démembrée.

Les bénéficiaires nus-propriétaires du contrat d’assurance-vie deviennent les nus-propriétaires dudit bien immobilier, ce qui les prémunit contre la dilapidation du capital de l’assurance-vie par l’usufruitier. 

La rédaction d’une clause bénéficiaire avec charge permet également, lorsque l’assuré doute de la bonne gestion du capital par le bénéficiaire, de le contraindre à en faire une bonne utilisation, par exemple en l’obligeant à réinvestir le capital dans un autre contrat d’assurance-vie, ou en empêchant le bénéficiaire de disposer du capital avant un certain âge. 

La rédaction d’une clause bénéficiaire avec charge est donc un véritable outil de gestion de patrimoine pour autrui, dont le souscripteur doit se saisir. 

La remise en cause de la clause bénéficiaire avec charge

Le bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie avec charge peut vouloir la remettre en cause s’il ne peut plus la supporter. 

Tel peut notamment être le cas d’un bénéficiaire s’étant engagé à remployer le capital dans un nouveau contrat d’assurance-vie, mais qui, se trouvant dans une situation financière délicate, aurait besoin de racheter ce deuxième contrat d’assurance-vie pour disposer de liquidités.

Le bénéficiaire doit cependant agir dans les dix ans suivant la mort du souscripteur du contrat d’assurance-vie. Il doit alors, par l’intermédiaire de son avocat, saisir le juge en attrayant à la procédure les autres héritiers et démontrer qu’en raison d’un changement de circonstances, l’exécution de la charge est devenue extrêmement difficile ou sérieusement dommageable (articles 900-2 et 900-5 du Code des assurances). 

« Tout gratifié peut demander que soient révisées en justice les conditions et charges grevant les donations ou legs qu’il a reçus, lorsque, par suite d’un changement de circonstances, l’exécution en est devenue pour lui soit extrêmement difficile, soit sérieusement dommageable. »

« La demande n’est recevable que dix années après la mort du disposant ou, en cas de demandes successives, dix années après le jugement qui a ordonné la précédente révision.

La personne gratifiée doit justifier des diligences qu’elle a faites, dans l’intervalle, pour exécuter ses obligations. »

L’indispensable précision de la clause bénéficiaire

Le souscripteur doit être très vigilant quant à la précision de la clause bénéficiaire, surtout s’il opte pour une clause à texte libre. Il faut que la rédaction de la clause permette à l’assureur de retrouver le bénéficiaire du contrat d’assurance-vie

Le risque est que le contrat d’assurance-vie soit considéré comme souscrit sans bénéficiaire. Le capital ou la rente intégreraient alors la succession du défunt (article L132-11 du Code des assurances).

En savoir plus sur la réintégration de l'assurance-vie dans la succession

« Lorsque l’assurance en cas de décès a été conclue sans désignation d’un bénéficiaire, le capital ou la rente garantis font partie du patrimoine ou de la succession du contractant. »

Cette précision n’est pas non plus à négliger lorsque l’assuré opte pour la rédaction d’une clause standard. 

En effet, désigner son conjoint et à défaut « ses héritiers » peut laisser un doute quant à l’identité des bénéficiaires de l’assurance-vie. La jurisprudence considère en effet, pour identifier le bénéficiaire qualifié « d’héritier »,  qu’il convient non pas de tenir compte de l’acception du terme héritier dans le langage courant ou à sa définition en droit des successions mais de rechercher la volonté précise du souscripteur (Cass. civ. 2ème, 14 décembre 2017, n° 16-27.206).

La modification de la clause bénéficiaire

Le souscripteur peut désigner le bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie en rédigeant une clause à cette fin.

La possibilité de modifier cette clause dépend d’abord de l’acceptation par le bénéficiaire.

Le principe :  la libre révocabilité de la clause bénéficiaire 

Le souscripteur n’est pas tenu d’informer le bénéficiaire de l’existence du contrat d’assurance-vie qu’il l’a institué en cette qualité. 

S’il ne le fait pas, le bénéficiaire le découvre au moment du décès de l’assuré.

Dans cette hypothèse, en application du principe de libre révocabilité de la stipulation pour autrui à défaut d’acceptation de son bénéficiaire, le souscripteur est libre de changer d’avis et donc de modifier, à tout moment, le bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie (article 1206 du Code civil, principe rappelé par Cass. 1re civ., 3 avr. 2019, nº 18-14.640). 

« Le bénéficiaire est investi d’un droit direct à la prestation contre le promettant dès la stipulation.

Néanmoins le stipulant peut librement révoquer la stipulation tant que le bénéficiaire ne l’a pas acceptée.

La stipulation devient irrévocable au moment où l’acceptation parvient au stipulant ou au promettant. »

L’exception : l’hypothèse de l’acceptation de la clause par le bénéficiaire

Le plus souvent, le bénéficiaire n’accepte le contrat d’assurance-vie qu’après le décès de l’assuré. 

Il est toutefois possible que le bénéficiaire formule son acceptation du vivant de l’assuré (et avec l’accord de ce dernier) grâce à un avenant par l’assuré et le bénéficiaire ou grâce à un acte authentique ou sous seing privé signé par l’assuré et le bénéficiaire (article L132-9 du Code des assurances). 

« I.-Sous réserve des dispositions du dernier alinéa de l’article L. 132-4-1, la stipulation en vertu de laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à un bénéficiaire déterminé devient irrévocable par l’acceptation de celui-ci, effectuée dans les conditions prévues au II du présent article. Pendant la durée du contrat, après acceptation du bénéficiaire, le stipulant ne peut exercer sa faculté de rachat et l’entreprise d’assurance ne peut lui consentir d’avance sans l’accord du bénéficiaire.

Tant que l’acceptation n’a pas eu lieu, le droit de révoquer cette stipulation n’appartient qu’au stipulant et ne peut être exercé de son vivant ni par ses créanciers ni par ses représentants légaux. Lorsqu’une tutelle a été ouverte à l’égard du stipulant, la révocation ne peut intervenir qu’avec l’autorisation du juge des tutelles ou du conseil de famille s’il a été constitué.

Ce droit de révocation ne peut être exercé, après la mort du stipulant, par ses héritiers, qu’après l’exigibilité de la somme assurée et au plus tôt trois mois après que le bénéficiaire de l’assurance a été mis en demeure par acte extrajudiciaire, d’avoir à déclarer s’il accepte.

L’attribution à titre gratuit du bénéfice d’une assurance sur la vie à une personne déterminée est présumée faite sous la condition de l’existence du bénéficiaire à l’époque de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis, à moins que le contraire ne résulte des termes de la stipulation.

II .- Tant que l’assuré et le stipulant sont en vie, l’acceptation est faite par un avenant signé de l’entreprise d’assurance, du stipulant et du bénéficiaire. Elle peut également être faite par un acte authentique ou sous seing privé, signé du stipulant et du bénéficiaire, et n’a alors d’effet à l’égard de l’entreprise d’assurance que lorsqu’elle lui est notifiée par écrit.

Lorsque la désignation du bénéficiaire est faite à titre gratuit, l’acceptation ne peut intervenir que trente jours au moins à compter du moment où le stipulant est informé que le contrat d’assurance est conclu.

Après le décès de l’assuré ou du stipulant, l’acceptation est libre. »

Cette acceptation diminue considérablement les pouvoirs de gestion de l’assuré, qui n’a en premier lieu plus le droit de modifier la clause bénéficiaire de son contrat sans l’accord du bénéficiaire.

La substitution du bénéficiaire par avenant 

Un avenant traduisant une volonté certaine et non équivoque

Selon l’article L.132-8 du code des assurances, la désignation ou la substitution du bénéficiaire d’un contrat d’assurance peut être réalisée « soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire ». 

«  Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l’assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.

Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

-les enfants nés ou à naître du contractant, de l’assuré ou de toute autre personne désignée ;

-les héritiers ou ayants droit de l’assuré ou d’un bénéficiaire prédécédé.

L’assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l’exigibilité.

Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession.

En l’absence de désignation d’un bénéficiaire dans la police ou à défaut d’acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu’avec l’accord de l’assuré, lorsque celui-ci n’est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.

Lorsque l’assureur est informé du décès de l’assuré, l’assureur est tenu de rechercher le bénéficiaire, et, si cette recherche aboutit, de l’aviser de la stipulation effectuée à son profit. »

La cour de cassation a tranché en 2019 un cas exemplaire (Cass. 1re civ., 3 avril 2019, nº 18-14.640) : après avoir désigné le bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie par voie testamentaire un assuré pouvait-il procéder à sa substitution grâce à un avenant, sous la forme d’un courrier à la compagnie d’assurance ?

La Cour de cassation a précisé à cette occasion que la désignation du bénéficiaire de l’assurance-vie faite initialement par testament pouvait être modifiée par simple avenant au contrat d’assurance-vie, dès lors que cet avenant traduisait une volonté certaine et non équivoque du souscripteur de modifier la désignation testamentaire.

Le calendrier de la substitution 

Il est nécessaire d’informer la compagnie d’assurance de cette substitution de bénéficiaire avant le décès de l’assuré. A défaut, la modification du bénéficiaire ne sera pas opposable à la compagnie d’assurance, qui pourra donc verser le capital au bénéficiaire initialement désigné par l’assuré (article L132-25 du Code des assurances).

« Lorsque l’assureur n’a pas eu connaissance de la désignation d’un bénéficiaire, par testament ou autrement, ou de l’acceptation d’un autre bénéficiaire ou de la révocation d’une désignation, le paiement du capital ou de la rente garantis fait à celui qui, sans cette désignation, cette acceptation ou cette révocation, y aurait eu droit, est libératoire pour l’assureur de bonne foi. »

La désignation du bénéficiaire par testament

La désignation du bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie par testament présente deux intérêts majeurs. 

En premier lieu, le notaire et les héritiers du défunt auront ainsi systématiquement connaissance du contrat d’assurance-vie, ce qui est une protection pour ces derniers. 

Ensuite, lorsque le testament est rédigé sous la forme authentique ou avec l’aide d’un avocat, le souscripteur pourra être conseillé sur la meilleure façon de rédiger la partie du testament relative à la désignation du bénéficiaire du contrat d’assurance-vie

En savoir plus sur les différentes formes de testaments

Ces professionnels du droit guideront la nécessaire précision de la désignation du bénéficiaire du contrat d’assurance-vie dans le testament pour éviter tout contentieux après le décès de l’assuré et permettre une utilisation optimale de l’assurance-vie.

Éviter le risque de réintégration de l’assurance-vie dans la succession

La désignation du bénéficiaire du contrat d’assurance-vie dans un testament (article L132-8 du Code des assurances), nécessite de la précision au risque de perdre le bénéficie des avantages civils et fiscaux liés à l’assurance-vie.

«  Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l’assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.

Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

-les enfants nés ou à naître du contractant, de l’assuré ou de toute autre personne désignée ;

-les héritiers ou ayants droit de l’assuré ou d’un bénéficiaire prédécédé.

L’assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l’exigibilité.

Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession.

En l’absence de désignation d’un bénéficiaire dans la police ou à défaut d’acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu’avec l’accord de l’assuré, lorsque celui-ci n’est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.

Lorsque l’assureur est informé du décès de l’assuré, l’assureur est tenu de rechercher le bénéficiaire, et, si cette recherche aboutit, de l’aviser de la stipulation effectuée à son profit. »

Il est par exemple régulièrement jugé que, si le testateur indique « léguer » son assurance-vie,  son intention est d’inclure le capital de son assurance-vie dans sa succession (Cass. Civ. 1ère, 10 octobre 2012, n°11-17891). 

Cette erreur de rédaction impacte négativement : 

  • le mécanisme civil de l’assurance-vie dont les sommes subissent alors le contrôle des héritiers grâce aux mécanismes de réserve héréditaire et de réduction parfois contre la volonté du défunt,
En savoir plus sur le mécanisme de la réduction des libéralités
  • le bénéfice fiscal de l’assurance-vie dont le capital est alors soumis aux droits de succession (aussi appelés « droits de succession à titre gratuit ») auxquels il devait justement échapper.
En savoir plus sur les droits de succession à titre gratuit

Ce type de disposition testamentaire doit donc être rédigée avec beaucoup de précaution au besoin en prenant conseil auprès d’un avocat ou d’un notaire pour assurer une exécution fidèle et efficace par la compagnie d’assurances-vie.

Le formalisme de la modification de la clause bénéficiaire par testament

L’assuré peut modifier la clause bénéficiaire initialement rédigée par voie testamentaire (article L132-8 du Code des assurances). 

«  Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l’assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.

Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

-les enfants nés ou à naître du contractant, de l’assuré ou de toute autre personne désignée ;

-les héritiers ou ayants droit de l’assuré ou d’un bénéficiaire prédécédé.

L’assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l’exigibilité.

Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession.

En l’absence de désignation d’un bénéficiaire dans la police ou à défaut d’acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu’avec l’accord de l’assuré, lorsque celui-ci n’est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.

Lorsque l’assureur est informé du décès de l’assuré, l’assureur est tenu de rechercher le bénéficiaire, et, si cette recherche aboutit, de l’aviser de la stipulation effectuée à son profit. »

Pour ce faire, le testament doit respecter son formalisme habituel et doit donc, à tout le moins, constituer un testament olographe (autrement dit, être écrit, daté et signé de la main du testateur). 

En savoir plus sur le formalisme du testament

A titre d’illustration, ne suffisent pas à modifier la clause bénéficiaire initiale : 

  • une lettre adressée à un notaire désignant un « unique héritier » ; 
  • un testament olographe révoquant les « donations » effectuées au profit du bénéficiaire initial (Cass. civ. 2ème, 13 juin 2019, n°18-14954).

Pour éviter tout litige lors du règlement de sa succession, l’assuré doit donc clairement indiquer dans son testament qu’il souhaite modifier la clause bénéficiaire et à quel profit.

Le souscripteur du contrat d’assurance-vie doit de manière générale s’assurer que le contenu de son testament permet de déduire sa volonté de substituer le bénéficiaire initialement désigné. 

Comment découvrir l’existence et le bénéficiaire d’une assurance-vie ? 

La découverte du bénéficiaire par le notaire en charge de la succession

Intérêt de la détention des informations relatives aux assurances-vie souscrites par le défunt

Les contrats d’assurance-vie sont dits « hors successions ».

Pourtant, les héritiers du souscripteur ont le droit et parfois le besoin de connaître les informations relatives aux contrats d’assurance-vie (date d’ouverture, montant versé, bénéficiaire, etc.) pour déterminer si leur réserve héréditaire a été atteinte et décider s’il y a lieu de remettre en cause le contrat d’assurance-vie en démontrant que les primes ont été manifestement excessives ou qu’il s’agit, en réalité, d’une donation

En savoir plus sur la réserve héréditaire En savoir plus sur les primes manifestement excessives pour contester une assurance-vie

Information spontanée par le Notaire

En tout premier lieu, le notaire en charge de la succession doit informer tous les organismes bancaires dans lesquels le défunt possédait des avoirs du décès du titulaire. C’est la première et la plus courante source d’information.

En savoir plus sur l'identification des comptes bancaires du défunt

A leur tour, les compagnies d’assurance-vie ainsi prévenues doivent informer le bénéficiaire de l’existence du contrat d’assurance-vie.

En revanche, les compagnies d’assurances-vie n’ont pas l’obligation légale de préciser au notaire ou aux héritiers le nom du bénéficiaire d’une assurance-vie. Une procédure devant le tribunal judiciaire est souvent nécessaire pour obtenir ces informations grâce à une injonction judiciaire.

Interrogation du fichier Ficovie

S’il ne souhaite pas se contenter du retour des banques qu’il a prévenu pour s’assurer qu’il a connaissance de tous les contrats d’assurance-vie souscrits par le défunt, les héritiers et le notaire peuvent consulter le Fichier national des contrats d’assurance-vie et de capitalisation (FICOVIE). Il lui permettra de connaître la nature du contrat, les coordonnées de l’organisme gestionnaire, les nom et prénom du bénéficiaire. L’expérience du cabinet montre cependant que cette dernière information est parfois manquante ou désuète. Il y a donc lieu de ne pas se satisfaire de cette seule source pour garantir son exhaustivité et son application.

Cette interrogation n’est pas systématique dans les opérations de compte, liquidation et partage d’une succession mais elle doit de notre point de vue être menée dès la moindre suspicion quant à la consistance du patrimoine du défunt ou si un héritier venait à constater, par exemple, des virements inexpliqués depuis le compte du défunt. 

Injonction judiciaire

Informations manquantes

Dans certains les cas, ni les réponses spontanées des assurances-vie au Notaire ni le retour de Ficovie ne permettent de connaître certaines informations pourtant fondamentales dans la compréhension du patrimoine du défunt et la surveillance du respect de la réserve héréditaire : 

  • nom des éventuels précédents bénéficiaires, 
  • dates et modalités des modifications intervenues, 
  • montant et date des versements sur le contrat, 
  • montant et fréquences des rachats par le souscripteur, 
  • etc.

Ces éléments peuvent être demandés spécifiquement et avec précision aux compagnies d’assurances-vie qui répondront le plus souvent sans trop de difficultés si l’ensemble des héritiers et des bénéficiaires se joint à cette démarche. Des relances, parfois fermes, sont nécessaires mais concluantes dans cette configuration.

En revanche, dès lors que l’une des parties marque son désaccord, les compagnies d’assurances-vie refusent de communiquer ces éléments. Il devient alors nécessaire de saisir le tribunal judiciaire.

Procédure judiciaire

Si la compagnie d’assurance refuse de transmettre à un héritier toutes les informations nécessaires au sujet d’un contrat d’assurance-vie, il est possible de saisir le Juge pour les obtenir. 

Cette saisine peut être effectuée en urgence, afin de ne pas bloquer le règlement de la succession pendant trop longtemps. 

Parmi les voies possibles, l’héritier peut saisir le Tribunal judiciaire sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile et démontrer que :

  • il a intérêt à agir, ce qui découle en réalité de sa qualité d’héritier réservataire ;
En savoir plus sur la notion d'héritier réservataire
  • il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de fait dont pourrait dépendre la solution d’un litige : cette preuve peut notamment être apportée lorsqu’un héritier parvient à démontrer que les informations que la compagnie d’assurance refuse de lui révéler pourraient, par exemple, justifier qu’il remette en cause le contrat d’assurance-vie en raison de primes manifestement excessives ou qu’il initie une action en réduction d’une donation ;
En savoir plus sur l'action en réduction
  • la pièce recherchée est détenue par celui auquel elle est réclamée.

« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé »

Si ces trois conditions sont réunies, le juge peut ordonner la production forcée d’une pièce : 

  • le contrat d’assurance-vie lui-même ;
  • un avenant modifiant le bénéficiaire ou la structure du contrat ;
  • le plan de versement de primes au contrat ;
  • le relevé des rachats partiels ;
  • l’évolution de la valeur du contrat sur plusieurs années ;
  • etc.

Le demandeur doit  faire attention à solliciter la production de pièces précisément déterminées, à défaut de quoi, sa demande pourrait être rejetée. 

D’autres possibilités procédurales existent lorsque, par exemple, un contentieux devant le tribunal judiciaire a déjà été initié, interdisant le recours à l’article 145 du code de procédure civile.

La découverte d’un contrat d’assurance-vie par le bénéficiaire lui-même

Toute personne qui s’interroge sur sa qualité de bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie peut contacter l’Association pour la Gestion des Informations sur le Risque en Assurance (AGIRA), qui, dans un délai -théorique- de quinze jours, adressera la demande à toutes les sociétés d’assurance, institutions de prévoyance et mutuelles, qui devront à leur tour chercher si le défunt a souscrit un contrat d’assurance-vie et si le demandeur en est le bénéficiaire (article 132-9-2 du Code des assurances). 

« Toute personne physique ou morale peut demander par lettre à un ou plusieurs organismes professionnels représentatifs, habilités à cet effet par arrêté du ministre chargé de l’économie, à être informée de l’existence d’une stipulation effectuée à son bénéfice dans une police souscrite par une personne physique dont elle apporte, par tout moyen, la preuve du décès.

Dans les quinze jours suivant la réception de la lettre mentionnée au premier alinéa, l’organisme transmet cette demande aux entreprises agréées pour exercer les opérations d’assurance dépendant de la durée de la vie humaine. Lorsque la personne morale ou physique mentionnée audit alinéa est désignée dans une police comme bénéficiaire, ces entreprises disposent d’un délai d’un mois pour l’informer de l’existence d’un capital ou d’une rente garantis payables à son bénéfice. »

L’organisme auprès duquel un contrat aurait été souscrit dispose alors d’un délai d’un mois pour informer le bénéficiaire de l’existence dudit contrat. 

En revanche, si la personne ayant formulé une demande auprès de l’AGIRA n’est bénéficiaire d’aucune assurance-vie, elle ne recevra pas de réponse. 

La découverte du bénéficiaire par l’assureur

Les assureurs, qui ne sont pas toujours prévenus directement des décès de leurs assurés, sont tenus d’identifier, annuellement, les souscripteurs décédés en consultant le répertoire national d’identification des personnes physiques (article L132-9-3 du Code des assurances).

« I. ― Les entreprises d’assurance mentionnées au 1° de l’article L. 310-1 du présent code ainsi que les institutions de prévoyance et unions régies par le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale s’informent, au moins chaque année, dans les conditions prévues au II du présent article, du décès éventuel de l’assuré. 

II. ― Les organismes professionnels mentionnés à l’article L. 132-9-2 consultent chaque année, dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, les données figurant au répertoire national d’identification des personnes physiques et relatives au décès des personnes qui y sont inscrites. Les entreprises d’assurance ainsi que les institutions de prévoyance et unions mentionnées au I obtiennent de ces organismes professionnels communication de ces données en vue d’effectuer des traitements de données nominatives. Ces traitements ont pour objet la recherche des assurés, des souscripteurs et des bénéficiaires décédés des contrats d’assurance sur la vie et des bons ou contrats de capitalisation, à l’exception de ceux au porteur. »

Dès qu’il apprend que l’un de ses assurés est décédé, l’assureur doit rechercher le bénéficiaire de l’assurance-vie et l’informer de la stipulation effectuée à son profit (article L132-8 du Code des assurances).

«  Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l’assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés.

Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l’exigibilité du capital ou de la rente garantis.

Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

-les enfants nés ou à naître du contractant, de l’assuré ou de toute autre personne désignée ;

-les héritiers ou ayants droit de l’assuré ou d’un bénéficiaire prédécédé.

L’assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l’exigibilité.

Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession.

En l’absence de désignation d’un bénéficiaire dans la police ou à défaut d’acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu’avec l’accord de l’assuré, lorsque celui-ci n’est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.

Lorsque l’assureur est informé du décès de l’assuré, l’assureur est tenu de rechercher le bénéficiaire, et, si cette recherche aboutit, de l’aviser de la stipulation effectuée à son profit. »

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