Guide Pratique
Famille et Divorce
Partie 1 - Régime matrimonial
Choisir son régime matrimonial
Dans tous les cas, le mariage donne naissance à une nouvelle patrimonialité. Aux époux de déterminer celle qui leur convient le mieux : c’est le choix du régime matrimonial.
Liberté des conventions matrimoniales
Les époux peuvent, avant et après la célébration de leur mariage, choisir le régime matrimonial de leur choix parmi ceux prévus par le Code civil :
- communauté de biens réduite aux acquêts,
- séparation de biens,
- participation aux acquêts,
- communauté universelle,
Ils ont en outre la possibilité de les affiner en insérant au sein de leur contrat de mariage des clauses spécifiques adaptées à leur situation familiale et patrimoniale, afin de convenir d’un régime matrimonial plus adapté.
Ces clauses ne pourront toutefois pas déroger à un corps de règles impératives applicables à tous les régimes matrimoniaux, appelé « régime primaire » (articles 212 à 226 du Code civil) ou à l’ordre public. Il est par exemple impossible de contractualiser le principe ou le calcul de la prestation compensatoire.
Important : En l’absence de contrat, les époux sont automatiquement mariés sous le régime légal de la communauté de biens réduite aux acquêts. |
« Les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance ».
Les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille. Ils pourvoient à l’éducation des enfants et préparent leur avenir.
Si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives. Si l’un des époux ne remplit pas ses obligations, il peut y être contraint par l’autre dans les formes prévues au code de procédure civile.
Les époux s’obligent mutuellement à une communauté de vie. La résidence de la famille est au lieu qu’ils choisissent d’un commun accord. Les époux ne peuvent l’un sans l’autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni. Celui des deux qui n’a pas donné son consentement à l’acte peut en demander l’annulation : l’action en nullité lui est ouverte dans l’année à partir du jour où il a eu connaissance de l’acte, sans pouvoir jamais être intentée plus d’un an après que le régime matrimonial s’est dissous.
Chaque époux a la pleine capacité de droit ; mais ses droits et pouvoirs peuvent être limités par l’effet du régime matrimonial et des dispositions du présent chapitre.
Un époux peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire, si celui-ci est hors d’état de manifester sa volonté ou si son refus n’est pas justifié par l’intérêt de la famille. L’acte passé dans les conditions fixées par l’autorisation de justice est opposable à l’époux dont le concours ou le consentement a fait défaut, sans qu’il en résulte à sa charge aucune obligation personnelle.
Un époux peut donner mandat à l’autre de le représenter dans l’exercice des pouvoirs que le régime matrimonial lui attribue. Il peut, dans tous les cas, révoquer librement ce mandat.
Si l’un des époux se trouve hors d’état de manifester sa volonté, l’autre peut se faire habiliter par justice à le représenter, d’une manière générale, ou pour certains actes particuliers, dans l’exercice des pouvoirs résultant du régime matrimonial, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge. A défaut de pouvoir légal, de mandat ou d’habilitation par justice, les actes faits par un époux en représentation de l’autre ont effet, à l’égard de celui-ci, suivant les règles de la gestion d’affaires.
Chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants : toute dette ainsi contractée par l’un oblige l’autre solidairement. La solidarité n’a pas lieu, néanmoins, pour des dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à l’utilité ou à l’inutilité de l’opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant. Elle n’a pas lieu non plus, s’ils n’ont été conclus du consentement des deux époux, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d’emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage.
Si l’un des époux manque gravement à ses devoirs et met ainsi en péril les intérêts de la famille, le juge aux affaires familiales peut prescrire toutes les mesures urgentes que requièrent ces intérêts. Il peut notamment interdire à cet époux de faire, sans le consentement de l’autre, des actes de disposition sur ses propres biens ou sur ceux de la communauté, meubles ou immeubles. Il peut aussi interdire le déplacement des meubles, sauf à spécifier ceux dont il attribue l’usage personnel à l’un ou à l’autre des conjoints. La durée des mesures prises en application du présent article doit être déterminée par le juge et ne saurait, prolongation éventuellement comprise, dépasser trois ans.
Si l’ordonnance porte interdiction de faire des actes de disposition sur des biens dont l’aliénation est sujette à publicité, elle doit être publiée à la diligence de l’époux requérant. Cette publication cesse de produire effet à l’expiration de la période déterminée par l’ordonnance, sauf à la partie intéressée à obtenir dans l’intervalle une ordonnance modificative, qui sera publiée de la même manière. Si l’ordonnance porte interdiction de disposer des meubles corporels, ou de les déplacer, elle est signifiée par le requérant à son conjoint, et a pour effet de rendre celui-ci gardien responsable des meubles dans les mêmes conditions qu’un saisi. Signifiée à un tiers, elle le constitue de mauvaise foi.
Sont annulables, à la demande du conjoint requérant, tous les actes accomplis en violation de l’ordonnance, s’ils ont été passés avec un tiers de mauvaise foi, ou même s’agissant d’un bien dont l’aliénation est sujette à publicité, s’ils sont simplement postérieurs à la publication prévue par l’article précédent. L’action en nullité est ouverte à l’époux requérant pendant deux années à partir du jour où il a eu connaissance de l’acte, sans pouvoir jamais être intentée, si cet acte est sujet à publicité, plus de deux ans après sa publication.
Chacun des époux peut se faire ouvrir, sans le consentement de l’autre, tout compte de dépôt et tout compte de titres en son nom personnel. A l’égard du dépositaire, le déposant est toujours réputé, même après la dissolution du mariage, avoir la libre disposition des fonds et des titres en dépôt.
Si l’un des époux se présente seul pour faire un acte d’administration, de jouissance ou de disposition sur un bien meuble qu’il détient individuellement, il est réputé, à l’égard des tiers de bonne foi, avoir le pouvoir de faire seul cet acte. Cette disposition n’est pas applicable aux meubles meublants visés à l’article 215, alinéa 3, non plus qu’aux meubles corporels dont la nature fait présumer la propriété de l’autre conjoint conformément à l’article 1404.
Chaque époux peut librement exercer une profession, percevoir ses gains et salaires et en disposer après s’être acquitté des charges du mariage.
Chacun des époux administre, oblige et aliène seul ses biens personnels.
Chacun des époux peut porter, à titre d’usage, le nom de l’autre époux, par substitution ou adjonction à son propre nom dans l’ordre qu’il choisit.
Les dispositions du présent chapitre, en tous les points où elles ne réservent pas l’application des conventions matrimoniales, sont applicables, par le seul effet du mariage, quel que soit le régime matrimonial des époux.
Dans tous les cas, ce contrat, qui organise leurs droits et leurs devoirs durant l’union, doit être rédigé par acte notarié (article 1394 du Code civil).
« Toutes les conventions matrimoniales seront rédigées par acte devant notaire, en la présence et avec le consentement simultanés de toutes les personnes qui y sont parties ou de leurs mandataires. Au moment de la signature du contrat, le notaire délivre aux parties un certificat sur papier libre et sans frais, énonçant ses nom et lieu de résidence, les noms, prénoms, qualités et demeures des futurs époux, ainsi que la date du contrat. Ce certificat indique qu’il doit être remis à l’officier de l’état civil avant la célébration du mariage ».
L’importance du choix du régime matrimonial
Il est crucial pour des futurs-époux ou des époux de bien comprendre le régime matrimonial qu’ils projettent d’adopter ou celui qui leur est applicable puisque chaque régime matrimonial recèle ses particularités.
Cette affirmation est d’autant plus exacte en présence d’un époux chef d’entreprise puisque l’existence d’une société complexifie très fréquemment les règles de fonctionnement du régime matrimonial durant le mariage et lors de sa liquidation.
Certains régimes matrimoniaux paraissent plus adaptés en présence d’un chef d’entreprise ou d’un cadre dirigeant, contrairement à d’autres qui font courir des risques financiers tant à l’époux non-entrepreneur qu’à la société de l’époux entrepreneur.
Les époux ont la possibilité de changer de régime matrimonial, processus réformé par la loi du 23 mars 2019 qui en simplifie considérablement les conditions.
La connaissance des règles applicables en la matière par les époux permet d’anticiper les difficultés et d’éviter les surprises au moment de leur divorce et de la liquidation de leur régime matrimonial.
La faculté de changer de régime matrimonial
Sans procédure judiciaire
Depuis le 1er janvier 2019, les époux peuvent changer de régime matrimonial ou l’aménager d’un commun accord et à tout moment (article 1397 du Code civil).
« Les époux peuvent convenir, dans l’intérêt de la famille, de modifier leur régime matrimonial, ou même d’en changer entièrement, par un acte notarié. A peine de nullité, l’acte notarié contient la liquidation du régime matrimonial modifié si elle est nécessaire.
Les personnes qui avaient été parties dans le contrat modifié et les enfants majeurs de chaque époux sont informés personnellement de la modification envisagée. Chacun d’eux peut s’opposer à la modification dans le délai de trois mois. En cas d’enfant mineur sous tutelle ou d’enfant majeur faisant l’objet d’une mesure de protection juridique, l’information est délivrée à son représentant, qui agit sans autorisation préalable du conseil de famille ou du juge des tutelles.
Les créanciers sont informés de la modification envisagée par la publication d’un avis sur un support habilité à recevoir des annonces légales dans le département du domicile des époux. Chacun d’eux peut s’opposer à la modification dans les trois mois suivant la publication.
En cas d’opposition, l’acte notarié est soumis à l’homologation du tribunal du domicile des époux. La demande et la décision d’homologation sont publiées dans les conditions et sous les sanctions prévues au code de procédure civile.
Lorsque l’un ou l’autre des époux a des enfants mineurs sous le régime de l’administration légale, le notaire peut saisir le juge des tutelles dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 387-3.
Le changement a effet entre les parties à la date de l’acte ou du jugement qui le prévoit et, à l’égard des tiers, trois mois après que mention en a été portée en marge de l’acte de mariage. Toutefois, en l’absence même de cette mention, le changement n’en est pas moins opposable aux tiers si, dans les actes passés avec eux, les époux ont déclaré avoir modifié leur régime matrimonial.
Lorsque l’un ou l’autre des époux fait l’objet d’une mesure de protection juridique dans les conditions prévues au titre XI du livre Ier, le changement ou la modification du régime matrimonial est soumis à l’autorisation préalable du juge des tutelles ou du conseil de famille s’il a été constitué.
Il est fait mention de la modification sur la minute du contrat de mariage modifié.
Les créanciers non opposants, s’il a été fait fraude à leurs droits, peuvent attaquer le changement de régime matrimonial dans les conditions de l’article 1341-2.
Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’Etat ».
La suppression d’un délai minimum offre aux époux une plus grande adaptabilité en vue de l’acquisition d’un bien immobilier, de la création d’une société, de l’achat de titres sociaux ou des cycles économiques défavorables.
Comme tout contrat de mariage, le changement de régime matrimonial doit être passé sous la forme d’un acte notarié qui liquide dans le même temps le précédent régime matrimonial.
Le coût du changement de régime dépend de l’émolument proportionnel du notaire, calculé sur la valeur des biens des époux.
La réforme supprime l’exonération prévue jusqu’alors relative au droit fixe de 125 euros. Le coût et la fiscalité liés à la liquidation sont maintenus.
Des formalités de publicité sont nécessaires, afin de permettre aux tiers créanciers d’user de leur droit d’opposition (délai de 3 mois à compter de la publication).
Les enfants majeurs et les parties au contrat de mariage initial seront spécialement informés de cette modification et disposent d’un droit d’opposition (délai de 3 mois à compter de la lettre recommandée avec accusé de réception). S’ils estiment que le changement envisagé est contraire à leurs intérêts. La procédure devient alors judiciaire.
Jusqu’à la réforme du 23 janvier 2019, l’homologation judiciaire du changement de régime matrimonial était également obligatoire en présence d’enfants mineurs, ce qui n’est plus systématiquement le cas.
Le législateur a désormais prévu une faculté pour le notaire de saisir le Juge des tutelles s’il considère que le changement ou la modification du régime matrimonial compromet manifestement et substantiellement les intérêts patrimoniaux du mineur ou peut porter un préjudice grave à celui-ci.
Avec procédure judiciaire
La procédure subséquente se déroule devant le Tribunal Judiciaire (anciennement appelé Tribunal de grande instance) du lieu de résidence de la famille, devant lequel la représentation par avocat est obligatoire. Ce dernier dépose une requête conjointe des époux à laquelle est annexé l’acte notarié. Tout comme le notaire, le Juge apprécie si le changement est conforme à l’intérêt de la famille et vérifie le consentement des époux.
Le changement prend effet à la date de l’acte notarié ou à la date du jugement du Juge aux affaires familiales, dans les relations entre époux, et est opposable aux tiers à compter de la publication.
Le changement de régime matrimonial est inscrit sur l’acte de mariage des époux.
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