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La détermination de la rémunération du chef d’entreprise est complexe, notamment en raison de la potentielle multiplicité de ses sources et de la liberté ponctuelle d’action dans leur fixation.

Revenus pris en compte dans la fixation et la détermination des pensions alimentaires et de la prestation compensatoire

Rémunérations issues de l’activité professionnelle

Les salaires et accessoires

Le salaire

Le salaire est une somme d’argent versée à un salarié en contrepartie du travail qu’il effectue pour un employeur. Il est constitué d’une rémunération fixe.

Tout comme le cadre dirigeant, le chef d’entreprise peut avoir choisi de se rémunérer au moins en partie en salaires.

Il est apprécié pour son montant en net – et non en brut – qui est un meilleur indicateur de la disponibilité de trésorerie. En outre, ce montant a l’avantage pour le juge d’apparaître directement sur le bulletin de salaire du mois de décembre.

AVIS DE L’EXPERT

Il est très possible que l’instauration du prélèvement à la source modifie les usages du Juge aux affaires familiales et qu’il considère désormais les montants de salaire après impôt sur le revenu.
Les avantages en nature

Les avantages en nature (véhicule de fonction, logement de fonction, frais de bouche, téléphone professionnel, etc.) représentent l’ensemble des biens ou services fournis par l’entreprise de manière gracieuse ou équivalent à un coût très faible. Ils ont souvent une récurrence plus importante permettant au juge de les considérer comme acquis à charge pour l’époux le cas échéant d’en apporter la preuve contraire.

Les primes et avantages en nature sont des compléments de rémunération qui participent au niveau de vie de son bénéficiaire. Les magistrats ont tendance à considérer qu’ils permettent de faire l’économie de certaines dépenses et donc de dégager une trésorerie pour fixer des pensions alimentaires ou une prestation compensatoire

Les primes et intéressement net déclarés

Au salaire peuvent s’ajouter des commissions, primes, et indemnités. 

Les primes peuvent être regroupées en deux catégories :

  • les primes de sujétion (primes de danger, de droit, de nuit, de dimanche, etc.),
  • les primes venant récompenser l’effort ou le mérite particulier (prime de rendement, d’ancienneté, de fin d’année, etc.).

Ces remerciements supplémentaires sont aléatoires par définition. Dans le cadre d’un divorce le Juge aux affaires familiales doit donc anticiper sur leur éventuel versement. Pour cela, le plus souvent, il se fonde sur les deux ou trois derniers exercices / années pour évaluer une probabilité. C’est ensuite à l’époux qui conteste cette analyse de démontrer que des circonstances nouvelles vont modifier à la hausse ou à la baisse la probabilité de l’octroi de la prime ou de l’intéressement, impactant ainsi les pensions alimentaires et la prestation compensatoire.

L’épargne salariale

L’épargne salariale est un système d’épargne collectif mis en place au sein de certaines entreprises. Le salarié bénéficie d’une prime liée à la performance de l’entreprise (intéressement) ou représentant une quote-part de ses bénéfices (participation). Les sommes attribuées peuvent parfois, au choix du salarié, lui être versées directement ou être déposées sur un plan d’épargne salariale.

Les sommes investies sur les plans seront bloquées :

  • pendant 5 ans minimum dans le cas d’un plan d’épargne d’entreprise (PEE),
  • jusqu’à l’âge de la retraite pour le Plan d’épargne retraite collectif (PERCO).

Cette épargne salariale peut donc être prise en compte de manière plus ou moins forte dans les ressources du justiciable par le juge pour la fixation des pensions alimentaires (devoir de secours ou contribution à l’entretien et l’éducation des enfants) ou de la prestation compensatoire selon qu’elle soit bloquée ou non. Le magistrat aura tendance à ne pas en tenir compte si l’argent n’est pas disponible au moment où il statue pour l’évaluation des pensions alimentaires. Néanmoins, cela indique qu’un complément de ressources est susceptible d’intervenir à moyen terme permettant une prise en compte plus importante pour l’évolution de la prestation compensatoire

Le traitement peut cependant être différent lorsque l’époux chef d’entreprise ou cadre dirigeant fait le choix personnel d’abonder son plan d’épargne salariale de sommes supplémentaires. 

Le compte épargne temps

Le compte épargne-temps (CET) permet au salarié d’accumuler des droits à congé rémunéré ou de bénéficier d’une rémunération (immédiate ou différée), en contrepartie des périodes de congé ou de repos non prises, ou des sommes qu’il y a affectées.

Le compte épargne temps, bien qu’ayant une valorisation financière théorique, n’est pas systématiquement liquide et disponible. 

Dès lors, tant que le compte est exerçable en temps, le Juge aux affaires familiales ne le considère généralement pas comme une ressource. 

Les indemnités de licenciement

Les sommes versées par un employeur en cas de départ d’un salarié ne représentent pas entièrement un substitut de revenus. Elles viennent réparer un préjudice lié à la perte de l’emploi et à ses modalités. Pour autant, c’est une disponibilité de trésorerie que le juge va pouvoir apprécier. 

Néanmoins, il devra également tenir compte du fait que les sommes sont potentiellement communes et auront donc vocation à être partagées, qu’elles n’ont aucune récurrence et qu’elles sont destinées à couvrir le délai de carence pendant lequel aucune indemnité chômage ne sera encore versée.

L’indemnité de non-concurrence

L’indemnité de non-concurrence vient compenser l’interdiction pour le salarié d’exercer une activité professionnelle concurrente à celle de son employeur après l’arrêt de son contrat de travail.

Elle peut donc également être considérée comme une rémunération pour la fixation des prestations compensatoires et pensions alimentaires. Dans la mesure où par définition l’indemnité de non-concurrence est à durée déterminée, le juge va cependant l’apprécier différemment selon la date à laquelle il va statuer et la durée restant à courir.

En cas d’arrêt prématuré de cette indemnité (à l’initiative de l’employeur), il appartiendra à l’époux qui n’en bénéficie plus de ressaisir le juge. 

Il faut aussi rappeler qu’une clause de non-concurrence peut être prévue pour les dirigeants non-salariés. Le traitement de l’indemnité sera identique.

La clause de maintien

La clause de maintien permet de récompenser le maintien du salarié dans l’entreprise. Il s’agit là aussi d’une contrepartie de l’activité professionnelle. 

Le juge pourra aussi la considérer, en tenant compte de la durée du maintien.
En cas de départ anticipé de la société, il appartiendra à l’époux qui perd cette source de revenus de saisir le Juge aux affaires familiales.

Bon à savoir : Les sommes versées en rémunération de l’activité professionnelle postérieure à la date des effets du divorce (date à partir de laquelle les revenus et de dettes de chaque époux lui deviennent propres) n’intègrent plus la communauté et deviennent personnelles à l’époux concerné.
En savoir plus sur la reprise des biens propres des époux

Rémunérations non-salariées

Le dirigeant de société pourra bénéficier d’autres rémunérations ou indemnités aussi complexes que variées que le juge considèrera dès lors qu’elles constituent un complément de revenus pour déterminer la prestation compensatoire et les pensions alimentaires. 

Les indemnités de gestion et jetons de présence
Les gérants de SARL et SAS

La rémunération du gérant de SARL ou de la SAS peut être fixée de plusieurs manières :

  • soit directement dans les statuts, ce qui est peu pratique en cas de modification. Dans ce cas, la rémunération demeure intangible et peu discutable par les avocats ;
  • soit par décision collective des associés, ce qui est plus souvent le cas. Le gérant participera au vote sur la fixation de sa rémunération s’il est associé. La rémunération de l’époux cadre dirigeant ou chef d’entreprise sera donc sujette à discussion devant le juge en fonction des pouvoirs dont ce dernier dispose en fonction de la répartition capitalistique. 

C’est donc en analysant les comptes de l’entreprise et la bonne gestion supposée de la société qu’il sera possible de déterminer si l’époux qui a vu ses revenus amoindris l’a fait en raison de la situation de la société ou s’il a agi compte tenu de l’instance en divorce en cours. 

Les administrateurs et membres des conseils et du directoire des SA

Jetons de présence

Dans les SA à conseil d’administration, les administrateurs perçoivent un montant fixe annuel, appelé « jetons de présence ». Le montant annuel est décidé par l’assemblée générale et le conseil d’administration les répartit entre ses membres. Ce même fonctionnement a lieu au sein des sociétés anonymes à conseil de surveillance. 

Les sommes perçues au titre de jetons de présence sont imposables fiscalement dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et ne sont soumises à aucune cotisation sociale.

Rémunérations de missions

En plus des jetons de présence, les administrateurs peuvent percevoir des rémunérations exceptionnelles en contrepartie des éventuelles missions qu’ils effectuent. Ces rémunérations exceptionnelles sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et ne sont soumises à aucune cotisation sociale.

Le président du conseil d’administration

Le président du conseil d’administration sera le seul à pouvoir percevoir, en plus des jetons de présence et des éventuelles rémunérations exceptionnelles, une rémunération au titre de ses fonctions de président qui pourra être fixe, proportionnelle ou fixe et proportionnelle.

Cette rémunération décidée par le conseil d’administration est imposable fiscalement dans la catégorie des traitements et salaires. 

A la différence des SARL et des SAS, l’existence de structures décisionnelles plus lourdes dans les SA amoindrit souvent la liberté d’action du chef d’entreprise sur sa rémunération, réduisant consécutivement le débat sur sa fixation devant le juge. L’avocat devra utilement étudier les mécanismes de décision et de représentation des sociétés en question pour confirmer ou infirmer ce premier constat.

En résumé :

Il est plus aisé pour le chef d’entreprise d’une petite structure de se verser des sommes ponctuellement et volontairement. À l’inverse, au sein d’une grande entité, la gouvernance est diluée entre intermédiaires et organes de décision.
Pourtant les « petites » entreprises ont également des besoins en gestion et trésorerie. Elles ont un intérêt social propre que le juge considère aussi pour fixer les pensions alimentaires et prestations compensatoires.
En savoir plus sur les différents types de sociétés et leur gouvernance
Les stock-options
Définition et liberté d’opter

Une stock-option est une option d’achat future accordée par une société à un salarié ou ses mandataires sociaux sur un certain nombre d’actions de la société.

Ce mécanisme permet à des salariés ou des dirigeants de société détenant moins de 10% du capital social de souscrire soit des actions nouvellement émises par une société dans le cadre d’une augmentation de capital soit d’acquérir des actions existantes spécialement affectées à cette fin.

Cette souscription a lieu à des conditions préférentielles et est réalisée par levée d’option dans un délai fixé lors d’une assemblée générale extraordinaire (article L. 225-183 du Code de commerce).

« L’assemblée générale extraordinaire fixe le délai pendant lequel les options doivent être exercées. Les droits résultant des options consenties sont incessibles jusqu’à ce que l’option ait été exercée. En cas de décès du bénéficiaire, ses héritiers peuvent exercer l’option dans un délai de six mois à compter du décès ».

Seules les sociétés cotées sont concernées.

Le titulaire de l’option décide librement de lever les options et peut devenir propriétaire d’actions selon un calendrier convenu, à un cours plus favorable et de réaliser une plus-value (de manière virtuelle lors de la levée de l’option puis de manière réelle et fiscalisée lorsqu’elles seront revendues).

Le droit d’exercice de l’option est strictement personnel à l’époux qui en est le bénéficiaire et incessible.

La Cour de cassation a précisé en 2014 le régime des stock-options dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial de la communauté légale dans un arrêt fondateur (Ccass Civ 1ère 9 juillet 2014 n° 13-15.948). 

En l’espèce, un des époux était titulaire de stock-options, attribuées pendant le mariage. Il lève une partie de ses options avant le divorce et une autre partie postérieurement. Son conjoint soutient que l’intégralité des stock-options avaient intégré la communauté car il s’agissait de complément de rémunération, en considérant que la qualification des stock-options (bien commun ou bien propre) dépendait de leur date d’attribution. 

La cour d’appel a fait droit à cette prétention. 

Cependant, l’arrêt d’appel est censuré par la cour de cassation qui a décidé que :

« Si les droits résultant de l’attribution, pendant le mariage, à un époux commun en biens, d’une option de souscription ou d’achat d’actions forment des biens propres par nature, les actions acquises par l’exercice de ces droits entrent dans la communauté lorsque l’option est levée durant le mariage ».

Certains auteurs de doctrine ont soutenu que le visa sous lequel cet arrêt a été rendu (articles 1404 du Code civil et L.225-183 du Code de commerce) expliquait la solution retenue. L’option serait un droit incessible, un droit personnel ou exclusivement attaché à la personne de son titulaire. Dès lors, du fait de cette incessibilité, il serait impossible d’appliquer la théorie de la distinction du titre et de la finance.

Forment des propres par leur nature, quand même ils auraient été acquis pendant le mariage, les vêtements et linges à l’usage personnel de l’un des époux, les actions en réparation d’un dommage corporel ou moral, les créances et pensions incessibles, et, plus généralement, tous les biens qui ont un caractère personnel et tous les droits exclusivement attachés à la personne.

Forment aussi des propres par leur nature, mais sauf récompense s’il y a lieu, les instruments de travail nécessaires à la profession de l’un des époux, à moins qu’ils ne soient l’accessoire d’un fonds de commerce ou d’une exploitation faisant partie de la communauté.

« L’assemblée générale extraordinaire fixe le délai pendant lequel les options doivent être exercées. Les droits résultant des options consenties sont incessibles jusqu’à ce que l’option ait été exercée. En cas de décès du bénéficiaire, ses héritiers peuvent exercer l’option dans un délai de six mois à compter du décès ».

Les auteurs qui s’opposent à cette solution considèrent au contraire que les options constituent une forme de rémunération alternance dont la valeur doit être intégrée, tout comme les gains et salaires, au sein du patrimoine commun des époux, en faisant l’objet d’une évaluation certes complexe. Avant que la Cour de cassation rende sa décision fondatrice en la matière en 2004, il convient de préciser que la cour d’appel de Paris avait appliqué la distinction du titre et de la finance aux stock-options en calculant la valeur de l’option (différence entre le prix d’exercice et la valeur du titre au jour de son acquisition).

L’intégration à la communauté

L’option a été levée avant le divorce

Les titres sociaux qui résultent de la levée des stocks options forment des biens propres par nature puisqu’ils sont exclusivement attachés à la personne de leur titulaire, qui les conservera à l’issue du divorce. Cependant leur valeur intègre la communauté.

En savoir plus sur la reprise des biens propres et le recensement du patrimoine commun

Dans le cadre du débat relatif à la prestation compensatoire, les actions issues des stock-options seront considérées comme du patrimoine de l’époux chef d’entreprise ou cadre dirigeant.

En savoir plus sur le débat relatif à la prestation compensatoire

L’option est levable mais non-exercée avant le divorce

La Cour de Cassation considère que ces options (ou les titres qu’elles représentent virtuellement) n’intègrent pas la communauté et doivent être tenues comme nulles dans le patrimoine du chef d’entreprise ou cadre dirigeant. 

On peut cependant penser qu’un débat – aussi important juridiquement que financièrement pour les époux lors du divorce – subsiste.

Les distributions d’actions ou de parts sociales (AGA)
Présentation

Une forme de plus en plus répandue de gratification, d’intéressement et de fidélisation des salariés et mandataires sociaux (à l’exclusion des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance) est l’attribution d’actions gratuites de l’entreprise

L’attribution d’actions gratuites par une société à ses salariés ou dirigeants constitue une alternative aux stock-options.

Bien que ponctuelle, elle est une forme de rémunération que le Juge aux affaires familiales peut être amené à considérer. 

Procédure d’attribution et condition de disponibilité

À l’instar des stocks options, la procédure d’attribution et les conditions de disponibilité des actions gratuites déterminent leur sort dans la liquidation du régime matrimonial des époux.

  • Phase « d’adoption du plan » durant laquelle l’assemblée générale extraordinaire prend une résolution déterminant les éléments principaux du plan et autorisant le conseil d’administration à conférer des actions gratuites. Puis, le conseil d’administration définit les modalités précises du plan et désigne les bénéficiaires
  • Phase « d’acquisition » : le bénéficiaire devient propriétaire de titres incessibles qui ne lui sont cependant pas encore attribués.  Le plan peut poser des conditions suspensives affectant le principe de l’attribution. Le plus fréquemment il s’agit d’une condition de présence du bénéficiaire au sein de la société au jour de l’attribution définitive ou de conditions de performance. Dans ce cas, l’époux bénéficiaire de l’attribution dispose de droits seulement conditionnels. Cette phase dure au moins un an (avant entrée en vigueur de la loi « Macron », le 8 août 2015, le délai était de 2 ans), du plan d’attribution à la date de l’attribution définitive (articles L. 225-197-1 et suivants du Code de commerce).
  • Phase ultime « d’attribution définitive / conservation » au terme de laquelle la propriété des actions est transférée à l’époux chef d’entreprise ou cadre dirigeant, même si ses actions peuvent rester temporairement incessibles. 

Attention : les périodes d’acquisition et de conservation doivent être au total d’au minimum 2 ans (article L. 225-197-1 du Code de commerce). Des dérogations aux délais d’acquisition et de conservation en cas de décès ou d’invalidité du bénéficiaire, ou encore d’opérations dites intercalaires (opérations d’échanges avec soulte, d’apport à un fond commun de placement par exemple) peuvent être toutefois prévues.

AVIS DE L’EXPERT

Il convient de vérifier les procès-verbaux d’assemblée générale lors desquelles les actions ont été distribuées afin d’en connaître les conditions.
Prise en compte par le Juge aux affaires familiales des actions gratuites

Comment le Juge aux affaires familiales doit-il considérer ce mécanisme complexe ? 

Quel est le critère temporel à retenir (rappel pour les stock-options : le critère retenu par le Cour de cassation est la levée de l’option) ? Les actions gratuites sont-elles des communs ou des biens propres si le divorce intervient pendant la phase dite « d’attribution » ?

En savoir plus sur les stock-options

La Cour de cassation ne s’est encore jamais prononcée sur la qualification des actions gratuites avant leur attribution définitive.

Un débat doctrinal important a lieu sur ce sujet, certains auteurs proposant de qualifier les actions de complément de rémunération, d’autres de bien propre du fait du caractère personnel et incessible des droits de l’époux bénéficiaire D’autres encore ont également suggérer d’appliquer la distinction du titre et de la finance, ce qui nécessiterait d’évaluer les actions, ce qui n’est pas un travail aisé, ce qu’a fait la cour d’appel de Paris en 2016 (cour d’appel de Paris, pôle 3 – ch. 1, nº 15/00988) :

« Considérant que X estime que les actions attribuées gratuitement par la société à Y provenant de son industrie comme élément de rémunération, doivent figurer à l’actif de la communauté tandis que l’intimé soutient que ces actions intransmissibles et incessibles sont donc des biens propres ;

Considérant que l’attribution, à un salarié, pendant le mariage, d’actions gratuites par son employeur constitue un mode de rémunération complémentaire, de sorte que leur valeur entre dans l’actif de la communauté peu important que le titre lui-même soit incessible et intransmissible ;

Considérant en conséquence qu’il y a lieu de faire droit à la demande de X de réintégration à l’actif de communauté des 4.980 actions TOTAL détenues par Y et d’infirmer le jugement qui a confié au notaire le soin d’examiner ce point ».

AVIS DE l’EXPERT

Pendant la période d’acquisition, le bénéfice définitif des actions étant principalement conditionné au maintien du cadre dirigeant dans l’entreprise, le Juge aux affaires familiales ne peut avoir que peu de certitudes sur l’acquisition après le divorce. Il devra donc raisonnablement omettre cet actif virtuel du patrimoine de l’époux ou en pondérer l’importance à la baisse et en tout état de cause relever que ce dernier n’en tire aucun revenu puisqu’il n’en est pas encore titulaire.
 
Pendant la période de conservation, l’époux ne peut céder les actions avant l’expiration du délai défini quand bien même il quitterait l’entreprise avant les termes fixés par la conservation. Il ne peut donc pas jouir de ce complément de rémunération avant le délai d’indisponibilité. Pourtant, le chef d’entreprise / cadre dirigeant a bien vu les actions gratuites rentrer dans son patrimoine. Le Juge aux affaires familiales est parfois tenté de les considérer pour l’évaluation de la prestation compensatoire. Sans être totalement impossible, leur prise en compte et leur évaluation est cependant aussi technique que risquée. Il en est autrement pour les pensions alimentaires qui peuvent plus difficilement être évaluées selon des ressources futures et incertaines.
Bon de souscription d’action (BSA)

Il s’agit d’une valeur mobilière qui donne le droit à son bénéficiaire d’acheter une ou plusieurs actions de la société à un prix fixé à l’avance (pour les SA, SAS, etc. : à l’exclusion donc des SARL). Le bénéficiaire du bon pourra pendant une période déterminée acheter l’action de la société à un prix fixe qui a été déterminé lors de l’attribution du BSA. Pour le bénéficiaire, cette opération peut être avantageuse car si le cours de l’action augmente, il pourra acheter ces titres à un prix inférieur à leur valeur ou vendre son BSA pour une valeur importante. Pour la société, l’avantage consiste à se procurer des liquidités et d’augmenter son capital aux termes d’une période donnée. La société permet aux salariés de l’entreprise ou aux dirigeants de l’entreprise de participer à la performance de l’entreprise, les intéresser au capital social et leur faire profiter de la prise de valeur de la société.

AVIS DE l’EXPERT

Les documents relatifs à la société ne révèlent pas l’existence du BSA tant qu’il n’est pas réalisé.
Le procès-verbal de l’assemblée générale lors de laquelle les bons sont émis ne mentionne pas le nom du bénéficiaire. L’existence du BSA ne peut être remarquée qu’au moment de l’augmentation de capital.
Bon de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE)

Il s’agit d’une opération sur le capital social qui permet de mettre en place un intéressement au capital social à la disposition des start-ups, en faveur de leurs salariés ou de leurs dirigeants. Ces derniers peuvent souscrire des actions de la société à un prix convenu lors de l’émission du bon. 

Pour le bénéficiaire, cette opération peut être avantageuse car si le cours de l’action augmente, il pourra acheter ces titres à un prix inférieur à leur valeur ou vendre son BSA pour une valeur importante. Pour la société, l’avantage consiste à se procurer des liquidités et d’augmenter son capital aux termes d’une période donnée.

Le « earn-out » et le complément de prix

Dans un contrat de cession d’entreprise (ou SPA), la clause d’earn-out prévoit le versement d’une somme en capital par l’acquéreur au cédant en cas d’atteinte des objectifs de performances opérationnelles futures de la société cédée.

Elle peut être considérée comme une forme de rémunération du chef d’entreprise cédant. 

À l’inverse, le contrat de cession prévoit souvent des conditions au versement d’un prix complémentaire. Ces éléments qui ne sont pas des rémunérations sont traités ici. Du fait de son versement unique et imprévisible et de l’absence de référent passé, le juge du divorce ne pourra pas adopter à propos du earn out un raisonnement similaire à celui des primes salariées pour fixer une prestation compensatoire ou une pension alimentaire (devoir de secours ou contribution à l’entretien et l’éducation des enfants). Les avocats devront donc étudier à la fois le contrat de cession, les bilans intermédiaires et l’activité de l’entreprise pour lui permettre de juger du taux de probabilité de la perception du earn out ou de démontrer qu’une quelconque projection est au contraire impossible. 

Les comptes-courant d’associés
Présentation

Les comptes courants d’associés sont expressément traités en fin de liste n’étant pas considérés a priori comme des éléments de rémunération.  

Le juge du divorce peut cependant avoir à les considérer comme des fonds liquides et disponibles en fonction de leur origine, de l’état de la société et de l’existence éventuelle de convention de comptes courants.Les comptes courants d’associés peuvent tout d’abord être constitués par des avances de fonds réalisées par les associés d’une société. Lorsque l’entreprise est confrontée à des besoins en financement de sa trésorerie, elle peut faire appel à eux pour qu’ils lui prêtent les sommes nécessaires. Il peut également s’agir de dividendes que la société a choisi ou n’a pas pu distribuer pour ménager sa trésorerie.

Bon à savoir : Les rémunérations inscrites aux comptes courant d’associés sont bien fiscalisées dans le foyer fiscal au titre des revenus de l’époux associé même s’il n’a pas pu les appréhender. 
Prise en compte par le Juge aux affaires familiales des comptes courants d’associé

Selon l’origine du compte-courant

Le Juge aux affaires familiales appréciera différemment le paiement du compte-courant à l’associé selon qu’il constitue un remboursement de sommes avancées par lui ou la distribution simplement retardée de bénéfices. Pourtant, le critère d’analyse principal dans le cadre du divorce sera la disponibilité des fonds qui est d’abord fonction de la trésorerie effective de la société.

En cas de contentieux, les avocats devront donc procéder à une analyse approfondie de la santé financière de l’entreprise (examen des bilans et de la gestion de la société) afin de déterminer si le gérant restera dans l’impossibilité de se voir verser des sommes significatives dans un futur proche ou au contraire s’il a sciemment évité de le faire pour ne pas les faire apparaitre sur ses comptes bancaires pendant la procédure de divorce.

Selon l’existence d’une convention de compte courant

Ce contrat entre l’associé et l’entreprise permet d’encadrer juridiquement les modalités de fonctionnement des avances en compte courant d’associé et notamment :

  • Une période d’indisponibilité pendant laquelle l’époux associé s’interdit de réclamer un paiement. Ce blocage opposable à l’époux même pendant sa procédure de divorce est généralement pris en compte par le Juge aux affaires familiales pour peu qu’il ne soit pas frauduleux ;
  • Une éventuelle rémunération au bénéfice de l’associé. Il est en effet possible que l’entreprise verse des intérêts à l’époux associé en contrepartie des sommes bloquées à son compte courant. Si ces intérêts sont effectivement versés ils devront être considérés pour ce qu’ils sont par le juge : un revenu.

Pour qu’elle soit valable, la convention doit être rédigée par écrit et être signée à la fois par la société et par l’associé concerné. Les parties sont libres de choisir de rémunérer ou de ne pas rémunérer les apports en compte courant d’associé.

Rémunération issue du patrimoine

Dividendes

Les dividendes sont la partie des bénéfices net d’une entreprise distribuée aux associés ou actionnaires, en fonction de leur participation. 

La variabilité vient des cycles de santé de la société. La décision de verser des dividendes n’est pas automatique : elle est prise par l’assemblée générale des actionnaires, en fonction des bénéfices engendrés.

Trois options s’offrent à l’Assemblée générale des actionnaires ou associés d’une société détenue en tout ou partie par un des époux : 

  • La distribution de dividendes : les actionnaires ou associés vont effectivement percevoir des fonds (qui seront puisés dans les liquidités de la société) ; 
  • La mise en réserve des bénéfices (qui ne sont donc pas distribués) ;
  • Le report à nouveau : il s’agit de reporter l’affectation du résultat à un exercice ultérieur. 

Il désigne donc la partie des bénéfices qui n’est ni distribuée en dividendes aux actionnaires ou associés, ni affectée en réserves.

Dans le premier cas, la source de revenus est certaine pour le Juge aux affaires familiales qui considèrera les dividendes au moment du divorce -ils apparaissent d’ailleurs sur l’avis d’impôt du foyer.

Dans les deux autres cas, le Juge aux affaires familiales appréciera l’opportunité de la décision de l’Assemblée générale et pourra considérer que ce choix de gestion ne doit pas impacter l’époux non associé.

Dans certains types de société le mode de gouvernance peut être strictement encadré et contraignant, ce qui peut complexifier le travail du Juge aux affaires familiales et donc nécessité une explication approfondie par les époux et leurs conseils.

En savoir plus sur les différents types de société et leur mode de gestion

Revenus de capitaux mobiliers (assurance-vie, PEA, PEE, etc.)

Il s’agit des revenus tirés de prêts d’argent et assimilés (produits des obligations et assimilés, revenus de créances, dépôts, cautionnements, comptes courants et livrets bancaires fiscalisés, livrets d’épargne entreprise, contrats d’assurance-vie plan d’épargne logement de plus de 12 ans…). 

Ces revenus sont largement considérés par le juge du divorce comme étant réguliers et disponibles. Seuls les cas de réinvestissements automatiques à l’intérieur du produit d’épargne peuvent donner lieu à débat.

Revenus de biens immobiliers : revenus fonciers et patrimoine frugifère

Les revenus fonciers représentent les revenus d’un patrimoine immobilier. Il s’agit indifféremment de biens immobiliers détenus directement via une SCI ou issus de la détention de parts de SCPI. Ils rentrent bien évidemment dans le calcul des ressources puisqu’ils viennent l’augmenter. 

Le principal débat sur ce point entre les avocats et le Juge aux affaires familiales pendant le divorce porte sur le patrimoine « non frugifère » qui ne produit pas de revenu, le plus souvent car il n’est pas loué. 

Cette situation peut être légitime dans de nombreux cas : lorsque l’époux propriétaire démontre qu’il ne dispose pas des liquidités suffisantes pour mettre son bien aux normes lorsque le bien sert à héberger un membre de la famille qui n’a pas les moyens de se loger. L’antériorité de la situation au divorce permettra plus facilement au Juge aux affaires familiales de se déterminer. Elle peut au contraire relever d’un choix discutable de gestion qui pourra alors inclure un loyer virtuel dans le budget de l’époux propriétaire considérant que l’autre époux n’a pas à subir les conséquences d’une mauvaise gestion pour fixer la prestation compensatoire ou la pension alimentaire. 

Brevets et droits d’auteur

Il existe une multitude d’autres catégories de revenus (brevet, droits d’auteur, droit à l’image, etc.).

En savoir plus sur les revenus liés à l'exploitation d'un brevet ou d'une œuvre

Le juge devra les considérer en tenant compte de leur régularité d’une année sur l’autre.

Substituts de revenus

Les indemnités chômage

L’Allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE, anciennes allocations Assedic) est calculée à partir des anciens salaires, y compris les primes et varie selon les modes d’activité (activité à temps plein, à temps partiel).

Le juge appréciera ces ressources en considérant en parallèle la durée restant à percevoir. Il pourra prendre également en compte la probabilité ou non que l’époux a de retrouver rapidement un emploi (selon le diplôme, le secteur, l’ancienneté etc.) même si cet exercice est éminemment périlleux et finalement assez rare en jurisprudence. Le plus souvent le Juge fixera sa décision selon la situation à la date laquelle il statue et considérera que l’un des époux pourra le saisir à nouveau en cas de survenance d’un élément nouveau (sauf évidemment s’agissant de la prestation compensatoire).

Les prestations sociales

Une prestation de protection sociale est un versement effectué par un organisme public afin de couvrir des dépenses considérées par la société comme des besoins primaires et fondamentaux : vieillesse, santé, famille, chômage, pauvreté, invalidité, etc.

Il existe une pluralité d’administrations :

  • Les Caisses d’allocations familiales (CAF) qui regroupent le complément familial, l’allocation de soutien familial (ASF), la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE), l’allocation de rentrée scolaire (ARS), l’aide personnelle au logement (APL), l’allocation aux adultes handicapés (AAH), le revenu de solidarité active (RSA), la  prime d’activité, etc. ;
  • Les Caisses d’assurance maladie qui versent des allocations supplémentaires d’invalidité (ASI) ou des aides au retour à domicile après hospitalisation (ARDH) ;
  • La Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) qui verse l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) et l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF).

La Cour de cassation considère que « les allocations familiales peuvent être prises en compte au titre des ressources dont chacun dispose » pour fixer la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants car elles sont destinées à assister les parents dans le règlement de ces dépenses (Ccass Civ 1ère 17 nov. 2010, n° 09-12.621). Les juges du fond sont donc libres de prendre en compte ou non les allocations familiales dans les ressources des parents. Cette appréciation sera effectuée au cas par cas et en fonction des situations d’espèce. 

Attention : en revanche, les allocations familiales ne tendent pas à procurer des revenus aux parents, de sorte qu’elles ne sauraient être prises en considération pour déterminer les ressources du débiteur ou du créancier d’une prestation compensatoire (Ccass Civ 1ère 15 février 2012 n° 11-11.000).

À noter : lorsque la partie adverse ne justifie pas des sommes qu’elle reçoit au titre des prestations sociales, il convient de prendre les devants et d’effectuer une simulation en ligne. Ce type d’initiative facilite le travail du Juge et permet une prise en considération de ces sommes.

Les pensions d’invalidité

La pension d’invalidité perçue par un époux, qui est destinée à compenser la perte de gains professionnels et les incidences professionnelles de l’incapacité, intègre les ressources à prendre en considération par le Juge aux affaires familiales pour fixer la prestation compensatoire (Ccass Civ 1ère 26 septembre 2012 n° 10-10.781 ; Conseil Constitutionnel 2 juin 2014 n° 2014-398 QPC au sujet du second alinéa de l’article 272 du Code civil).

Le juge pourra tenir compte d’une possible évolution, sauf à démontrer que l’affection est peu susceptible d’évolution.

La prestation compensatoire

La prestation compensatoire perçue par un époux, versée sous forme de rente par un ex-conjoint dans le cadre d’un précédent divorce, constitue pour ce dernier une ressource. C’est un fait. Cependant, la Cour de cassation refuse que cette somme soit intégrée dans les ressources de l’époux créancier.

Les assurances de loyers impayés

L’assurance des loyers impayés ou Garantie des Loyers Impayés (GLI) sécurise les revenus du propriétaire bailleur. En cas de défaillance d’un locataire, de détériorations et dégradations ou en cas de décès ou départ prématuré du locataire, l’assurance indemnise le propriétaire jusqu’à la récupération des locaux. 

Ce substitut de revenu est considéré par le Juge aux affaires familiales comme le loyer lui-même dans la fixation des pensions alimentaires et la prestation compensatoire. Il doit seulement éventuellement considérer la limite dans le temps de ce versement dans le contrat de garantie.

Les indemnités liées à la réparation d’un préjudice corporel ou moral

Les indemnités réparant un dommage corporel lié à un accident ou une maladie ou un préjudice moral causé à soi ou à un proche sont des biens propres à l’époux quel que soit le régime matrimonial. Cependant ces sommes doivent être prises en compte dans la comptabilisation de ses ressources. 

Un arrêt de la Cour de cassation du 18 décembre 2013 a par exemple considéré que les sommes perçues par une épouse au titre de la réparation d’un préjudice corporel consécutif à un accident de la circulation dont elle avait été victime constituait un substitut de revenus professionnels à prendre en considération dans le divorce (Ccass Civ 1ère 18 déc. 2013, n°12-29-127).

Rémunérations prévisibles

Pour la seule évaluation de la prestation compensatoire, la loi demande également au juge de considérer la situation prévisible des époux après le divorce.

Le Juge aux affaires familiales s’intéresse notamment aux droits à la retraite de l’époux chef d’entreprise, qui devra justifier des contrats qu’il a pu souscrire à ce titre (les contrats dits « Madelin », etc.).

Revenus cachés

Afin d’éluder le versement de pensions alimentaires ou d’une prestation compensatoire, un époux peut tenter d’entretenir une véritable opacité financière ou de simplement dissimuler ses ressources auprès du magistrat. 

Il appartient alors au conseil adverse de se référer au train de vie de l’époux pour démontrer l’incohérence du patrimoine présenté ou de son train de vie.  

À ce titre, l’accès aux réseaux sociaux peut être un outil très efficace.

Il est également utile de transmettre à l’époux concerné une sommation de communiquer les éléments de revenus en listant précisément les documents souhaités. Le refus de l’époux récalcitrant est pris en compte, tant pour la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants qu’en matière de prestation compensatoire.

La Cour de cassation a pu ainsi estimer que :

« Faute d’éléments sur les ressources, le montant de la contribution à l’entretien et l’éducation de son fils est souverainement déterminé par les juges du fond en considération des besoins d’un enfant de son âge » (Ccass Civ 1ère 12 juin 2013 n° 12-19.569).

La Haute juridiction est même allée plus loin dans un arrêt du 15 janvier 2020 en précisant que les juges du fond doivent rechercher si les époux n’exercent pas d’activité professionnelle productive de revenus (Ccass Civ 1ère 15 janvier 2020 n°18-26.012). Il est donc primordial pour l’avocat de l’époux qui se plaint du manque de transparence de son conjoint sur les revenus occultes de ce dernier, afin que le Juge effectue des recherches et en tire toutes les conséquences.

Charges du débiteur d’aliments prises en compte dans la fixation et la détermination des pensions alimentaires et de la prestation compensatoire

Le montant des pensions alimentaires (contribution à l’entretien et l’éducation des enfants et devoir de secours) est fonction des besoins du créancier d’aliments et de ses ressources, mais aussi des charges du débiteur.

Toutes ne sont cependant pas considérées de manière identique.

Le juge fait systématiquement le tri entre les dépenses qui doivent passer prioritairement avant ou après les besoins du conjoint ou des enfants qui sont des créances de nature alimentaire. C’est le cas de l’ensemble des dépenses incompressibles, de certaines dettes dites « courantes », mais pas des dépenses d’agrément.

Les charges les plus communément retenues par le magistrat : les charges incompressibles

Le juge va, pour déterminer et fixer le montant des pensions alimentaires et de la prestation compensatoire éventuelle, prendre en considération les charges incompressibles de l’époux débiteur :

  • Les emprunts immobiliers liés à la résidence principale : en pratique, il est judicieux d’attirer l’attention du magistrat sur le fait que le débiteur de la pension alimentaire a pu s’endetter fortement pour se loger pour que cette charge volontaire ne soit pas préjudiciable au créancier d’aliment ;
  • Les prêts à la consommation : c’est l’utilisation de la somme empruntée qui déterminera le plus souvent le Juge. Affecté à un besoin insurmontable, il sera pleinement considéré. Souscrit frauduleusement pour alourdir son budget, il sera écarté ;
  • Le loyer est également comptabilisé sauf si le montant est manifestement exorbitant au regard des ressources du justiciable qui s’en prévaut ;
  • Tous les impôts sont bien évidemment pris en compte par le juge du divorce comme des dépenses incompressibles (impôt sur le revenu, impôt sur la fortune immobilière (IFI), la contribution sociale généralisée ou encore la taxe d’habitation et les taxes foncières sur les résidences principales ;
  • La pension alimentaire versée aux ascendants ou la contribution à l’entretien et l’éducation d’enfants d’un premier lit ou prestation compensatoire versée à un ancien époux : supporter une telle pension est en théorie une charge incompressible du fait du caractère alimentaire et donc prioritaire de l’obligation. Le travail de l’avocat est cependant de s’intéresser à la source de l’obligation alimentaire : s’agit-il d’un jugement ? D’un paiement spontané ? D’un paiement nécessaire ?
    • La Cour de cassation a déjà pu estimer que les juges du fond devaient prendre en compte la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants commun :
    • « Attendu que, pour condamner M. X…à verser une prestation compensatoire d’un certain montant à Mme Y…, l’arrêt retient, après avoir analysé le patrimoine des parties tant en capital qu’en revenus ainsi que leurs droits prévisibles à retraite, que l’épouse, âgée de 51 ans et sans perspective d’évolution professionnelle, a été employée par son mari en qualité de secrétaire comptable pendant neuf ans et s’est consacrée à l’éducation des quatre enfants communs, favorisant ainsi la carrière de ce dernier ;  Qu’en se déterminant ainsi, sans prendre en considération les sommes versées par M. X…au titre de sa contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants communs, lesquelles, constituant des charges, devaient venir en déduction des ressources, la cour d’appel a privé sa décision de base légale; » (Ccass Civ 1ère 27 sept. 2017 n° 16-24360) ;
  • L’apport de trésorerie personnelle à une société et aux comptes courants :  l’époux associé peut avancer des fonds personnels à sa société via ses comptes courants d’associés. Cette charge sera moins facilement considérée par le Juge aux affaires familiales  si elle est réellement nécessaire pour préserver l’outil professionnel ou assurer le logement familial (cas des SCI) ou au contraire du fait de leur caractère disponible. Il appartient à l’époux concerné et son conseil de le démontrer. 
En pratique : La situation de concubinage des époux avec une tierce personne sera prise en considération par le Juge aux affaires familiales dans l’appréciation de leurs situations puisqu’elle conduit à un partage des charges (Ccass Civ 1ère 11 juin 2008, n° 07-10.285).
 
De même, la naissance d’un nouvel enfant alourdira le budget du débiteur d’aliment et pourra donc être pris en considération.

Les charges les plus communément retenues par le magistrat : les charges incompressibles

Le juge va, pour déterminer et fixer le montant des pensions alimentaires et de la prestation compensatoire éventuelle, prendre en considération les charges incompressibles de l’époux débiteur :

  • Les emprunts immobiliers liés à la résidence principale : en pratique, il est judicieux d’attirer l’attention du magistrat sur le fait que le débiteur de la pension alimentaire a pu s’endetter fortement pour se loger pour que cette charge volontaire ne soit pas préjudiciable au créancier d’aliment ;
  • Les prêts à la consommation : c’est l’utilisation de la somme empruntée qui déterminera le plus souvent le Juge. Affecté à un besoin insurmontable, il sera pleinement considéré. Souscrit frauduleusement pour alourdir son budget, il sera écarté ;
  • Le loyer est également comptabilisé sauf si le montant est manifestement exorbitant au regard des ressources du justiciable qui s’en prévaut ;
  • Tous les impôts sont bien évidemment pris en compte par le juge du divorce comme des dépenses incompressibles (impôt sur le revenu, impôt sur la fortune immobilière (IFI), la contribution sociale généralisée ou encore la taxe d’habitation et les taxes foncières sur les résidences principales ;
  • La pension alimentaire versée aux ascendants ou la contribution à l’entretien et l’éducation d’enfants d’un premier lit ou prestation compensatoire versée à un ancien époux : supporter une telle pension est en théorie une charge incompressible du fait du caractère alimentaire et donc prioritaire de l’obligation. Le travail de l’avocat est cependant de s’intéresser à la source de l’obligation alimentaire : s’agit-il d’un jugement ? D’un paiement spontané ? D’un paiement nécessaire ?
    • La Cour de cassation a déjà pu estimer que les juges du fond devaient prendre en compte la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants commun :
    • « Attendu que, pour condamner M. X…à verser une prestation compensatoire d’un certain montant à Mme Y…, l’arrêt retient, après avoir analysé le patrimoine des parties tant en capital qu’en revenus ainsi que leurs droits prévisibles à retraite, que l’épouse, âgée de 51 ans et sans perspective d’évolution professionnelle, a été employée par son mari en qualité de secrétaire comptable pendant neuf ans et s’est consacrée à l’éducation des quatre enfants communs, favorisant ainsi la carrière de ce dernier ;  Qu’en se déterminant ainsi, sans prendre en considération les sommes versées par M. X…au titre de sa contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants communs, lesquelles, constituant des charges, devaient venir en déduction des ressources, la cour d’appel a privé sa décision de base légale; » (Ccass Civ 1ère 27 sept. 2017 n° 16-24360) ;
  • L’apport de trésorerie personnelle à une société et aux comptes courants :  l’époux associé peut avancer des fonds personnels à sa société via ses comptes courants d’associés. Cette charge sera moins facilement considérée par le Juge aux affaires familiales  si elle est réellement nécessaire pour préserver l’outil professionnel ou assurer le logement familial (cas des SCI) ou au contraire du fait de leur caractère disponible. Il appartient à l’époux concerné et son conseil de le démontrer. 
En pratique :

La situation de concubinage des époux avec une tierce personne sera prise en considération par le Juge aux affaires familiales dans l’appréciation de leurs situations puisqu’elle conduit à un partage des charges (Ccass Civ 1ère 11 juin 2008, n° 07-10.285).
 
De même, la naissance d’un nouvel enfant alourdira le budget du débiteur d’aliment et pourra donc être pris en considération.

Les charges forfaitisées ou partagées : les charges de la vie courante

Le Juge aux affaires familiales ne va apprécier des charges certes inévitables mais qui sont partagées par tous qu’en deuxième lieu, c’est le cas : 

  • des assurances habitation, automobile, civile, scolaire etc.,
  • de la mutuelle, 
  • des frais de gestion et d’entretien de son patrimoine notamment immobilier,
  • des frais de téléphonie et internet,
  • des frais de transport,
  • frais d’eau, de chauffage et d’électricité, etc.

Le plus souvent, le Juge les appréciera mais de manière forfaitaire, c’est-à-dire sans les considérer à 100%.

Les charges le plus souvent non considérées par le magistrat : les dépenses d’agrément et de loisirs

Le Juge aux affaires familiales aura tendance à exclure de son calcul les dépenses d’agrément ou de loisirs lesquelles sont secondaires et non prioritaires par rapport aux obligations d’aliments (pensions alimentaires et prestation compensatoire). 

La liste n’est pas exhaustive, on dénombre à titre d’exemple :

  • les abonnements TV et satellite, 
  • les abonnements sportifs,
  • les loisirs et vacances,
  • l’emploi de personnel (femme de ménage, jardinier),
  • les frais de vêture, 
  • la presse, etc.

Il est cependant possible dans certaines configurations d’obtenir la prise en compte plus globale du « train de vie » des époux dans le cadre de la fixation du devoir de secours (exemple : prise en compte des frais de vétérinaires : cour d’appel de Colmar 5 janv. 2016 n° 14-03838, etc.). 

En tout état de cause, l’appréciation faite par le juge du divorce n’est pas immuable. Elle est réalisée au cas par cas, en fonction de chaque situation et de la présentation qui en est faite par les avocats. 

En pratique :

Toujours débordés par leur manque de moyens et par les dossiers qui engorgent leurs tribunaux, les Juges aux affaires familiales indiquent de plus en plus clairement aux parties et aux avocats qu’ils n’ont pas la possibilité de faire l’analyse profonde des budgets de chacun et ne retiennent désormais que les postes principaux notamment relatifs au logement dans la fixation des pensions alimentaires et de la prestation compensatoire au moment du divorce.

Le travail des époux et de leurs conseils consiste donc à rationaliser, simplifier et expliquer le plus clairement possible la situation de chacun.

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