Cas Pratique
Tutelle
Je suis sous curatelle et je souhaite procéder à une donation
Protection des majeurs (tutelle – curatelle – sauvegarde)Monsieur Ross, âgé de 80 ans, a été placé sous une mesure de curatelle et sa sœur, Madame Monica a été désignée curatrice.
En se rendant chez son frère, Madame Monica a remarqué que trois tableaux de valeur avaient disparu du mur du salon.
Après quelques recherches, Madame Monica découvre que son frère Monsieur Ross les a donnés à Madame Rachel, une vieille amie.
Que conseiller à Madame Monica ? Peut-elle remettre en cause cette donation réalisée par son frère ?
Un majeur sous curatelle peut-il effectuer une donation ?
La curatelle est une mesure judiciaire destinée à protéger un majeur qui, sans être hors d’état d’agir lui-même, a besoin d’être conseillé ou contrôlé dans certains actes de la vie civile.
Une personne placée sous mesure de curatelle peut effectuer des donations mais doit respecter certaines conditions.
Elle doit tout d’abord être assistée de son curateur pour réaliser une donation.
Si la libéralité est destinée au curateur lui-même, ce dernier doit obligatoirement solliciter du juge des tutelles (désormais appelé « Juge du contentieux de la protection ») la désignation d’un administrateur ad hoc pour assister la personne protégée afin d’éviter tout conflit d’intérêts.
En savoir plus sur la réalisation d'une donation et la rédaction d'un testament sous curatelleLa donation réalisée par un curatélaire sans l’assistance de son curateur peut-elle être remise en cause ?
Le curateur a la possibilité d’agir en justice pour faire annuler une donation que le curatélaire, c’est-à-dire le majeur protégé placé sous un régime de curatelle, aurait passé sans son assistance.
L’article 465 du Code civil impose toutefois que lorsque le majeur protégé sous curatelle accomplit un acte seul pour lequel il aurait dû être assisté par son curateur, l’acte litigieux ne puisse être annulé que s’il est établi que la personne protégée a subi un préjudice.
« A compter de la publicité du jugement d’ouverture, l’irrégularité des actes accomplis par la personne protégée ou par la personne chargée de la protection est sanctionnée dans les conditions suivantes :
1° Si la personne protégée a accompli seule un acte qu’elle pouvait faire sans l’assistance ou la représentation de la personne chargée de sa protection, l’acte reste sujet aux actions en rescision ou en réduction prévues à l’article 435 comme s’il avait été accompli par une personne placée sous sauvegarde de justice, à moins qu’il ait été expressément autorisé par le juge ou par le conseil de famille s’il a été constitué ;
2° Si la personne protégée a accompli seule un acte pour lequel elle aurait dû être assistée, l’acte ne peut être annulé que s’il est établi que la personne protégée a subi un préjudice ;
3° Si la personne protégée a accompli seule un acte pour lequel elle aurait dû être représentée, l’acte est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice ;
4° Si le tuteur ou le curateur a accompli seul un acte qui aurait dû être fait par la personne protégée soit seule, soit avec son assistance ou qui ne pouvait être accompli qu’avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué, l’acte est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice.
Le curateur ou le tuteur peut, avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué, engager seul l’action en nullité, en rescision ou en réduction des actes prévus aux 1°, 2° et 3°.
Dans tous les cas, l’action s’éteint par le délai de cinq ans prévu à l’article 2224.
Pendant ce délai et tant que la mesure de protection est ouverte, l’acte prévu au 4° peut être confirmé avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué. »
Cela signifie que Madame Monica devra prouver au Juge le préjudice subi par son frère suite à la donation de ses tableaux à sa voisine. La donation étant un appauvrissement sans contrepartie, il peut être présumé qu’elle porte préjudice au donateur.
Bon à savoir : dans le cadre d’une mesure de tutelle, lorsque le tutélaire, c’est-à-dire une personne placée sous un régime de tutelle, effectue une donation sans l’autorisation judiciaire préalable (par le juge des tutelles ou le conseil de famille), l’acte est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un quelconque préjudice. |
Est-ce votre cas ? Si vous n’êtes pas dans ce cas spécifique, mais qu’un de vos proches se trouve soumis à un autre régime de protection et qu’il souhaite faire une opération de cession, de donation ou un testament, n’hésitez pas à nous contacter. |
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