Guide Pratique
Successions
Partie 11 - Gestion/vente/occupation de l’indivision successorale
Définition de l'indivision successorale
Qui sont les indivisaires ?
L’indivision est la situation d’un bien ou d’un ensemble de biens sur lequel plusieurs personnes sont titulaires de droits de même nature, concurrents, sans qu’aucune d’entre elles n’ait de droit exclusif sur une partie déterminée.
L’indivision peut résulter de la liquidation d’un régime matrimonial, d’une société, d’une succession ou de l’achat d’un bien par plusieurs propriétaires.
Lorsque la situation d’indivision résulte d’une succession, qui sont les indivisaires, membres de l’indivision successorale ?
Les héritiers du de cujus
Après un décès, s’il y a plusieurs héritiers, les biens de la succession peuvent se trouver en situation d’indivision, c’est-à-dire qu’ils appartiennent à l’ensemble des héritiers, chacun disposant d’une quote-part de propriété sur ces biens.
Héritiers désignés par la loi
Détermination des héritiers
La loi détermine les héritiers du de cujus selon plusieurs grands principes :
- ordre des héritiers : l’article 734 du Code civil prévoit 6 ordres d’héritiers (descendants, ascendants, collatéraux, etc.) pour lesquels l’existence d’une de ces catégories exclut les suivantes. A titre d’illustration, les parents du défunt ne pourront hériter que si ce dernier ne laisse ni conjoint survivant, ni enfants ni petits-enfants.
« En l’absence de conjoint successible, les parents sont appelés à succéder ainsi qu’il suit :
1° Les enfants et leurs descendants ;
2° Les père et mère ; les frères et soeurs et les descendants de ces derniers ;
3° Les ascendants autres que les père et mère ;
4° Les collatéraux autres que les frères et sœurs et les descendants de ces derniers.
Chacune de ces quatre catégories constitue un ordre d’héritiers qui exclut les suivants. »
- degré des héritiers : à l’intérieur de chaque « ordre », les héritiers sont catégorisés par « degrés » conformément aux dispositions des articles 741 du Code civil et suivants « la proximité de parenté s’établit par le nombre de générations ; chaque génération s’appelle un degré ». Ainsi dans un même ordre, seuls les membres de la famille bénéficiant des degrés le plus proches pourront prétendre au titre d’héritier (à l’exception des parents et des frères et sœurs qui viennent en concurrence) ;
« La proximité de parenté s’établit par le nombre de générations ; chaque génération s’appelle un degré ».
- branches : la division des héritiers par branche est un principe de répartition de la succession prévu par l’article 746 du Code civil en deux fractions égales en cas d’absence de descendants, respectivement dévolues à la branche paternelle et à la branche maternelle du défunt.
« La parenté se divise en deux branches, selon qu’elle procède du père ou de la mère »
La succession du défunt est ainsi équitablement répartie entre la branche maternelle et paternelle. Il existe toutefois de nombreux domaines d’exclusion.
Cas d’exclusion
La loi peut aussi décider de l’exclusion de certains héritiers :
- l’indignité successorale : elle est une peine civile prévue par l’article 726 du Code civil privant un héritier de ses droits successoraux en raison des fautes commises envers le défunt. L’indignité successorale peut être déclarée automatiquement ou de façon facultative à la demande d’un autre héritier et aura pour effet de priver l’héritier indigne de certains de ses droits. L’indigne n’hérite pas ; il n’a donc pas la qualité d’indivisaire.
« Sont indignes de succéder et, comme tels, exclus de la succession :
1° Celui qui est condamné, comme auteur ou complice, à une peine criminelle pour avoir volontairement donné ou tenté de donner la mort au défunt ;
2° Celui qui est condamné, comme auteur ou complice, à une peine criminelle pour avoir volontairement porté des coups ou commis des violences ou voies de fait ayant entraîné la mort du défunt sans intention de la donner. »
- les incapacités à recevoir : afin de prévenir certains abus, les articles 909 et suivants du Code civil instituent certaines corps de métiers comme incapables de recevoir par donation ou testament.
« Les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux qui ont prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu’elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de celle-ci.
Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs et les personnes morales au nom desquelles ils exercent leurs fonctions ne peuvent pareillement profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires que les personnes dont ils assurent la protection auraient faites en leur faveur quelle que soit la date de la libéralité.
Sont exceptées :
1° Les dispositions rémunératoires faites à titre particulier, eu égard aux facultés du disposant et aux services rendus ;
2° Les dispositions universelles, dans le cas de parenté jusqu’au quatrième degré inclusivement, pourvu toutefois que le décédé n’ait pas d’héritiers en ligne directe ; à moins que celui au profit de qui la disposition a été faite ne soit lui-même du nombre de ces héritiers.
Les mêmes règles seront observées à l’égard du ministre du culte. »
« I. – Les dispositions entre vifs ou par testament au profit des établissements de santé, des établissements sociaux et médico-sociaux ou d’établissements d’utilité publique n’ont leur effet qu’autant qu’elles sont autorisées par arrêté du représentant de l’Etat dans le département.
- – Toutefois, les dispositions entre vifs ou par testament au profit des fondations, des congrégations et des associations ayant la capacité à recevoir des libéralités et, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, des établissements publics du culte et des associations inscrites de droit local, à l’exception des associations ou fondations dont les activités ou celles de leurs dirigeants sont visées à l’article 1er de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, sont acceptées librement par celles-ci. Si le représentant de l’Etat dans le département constate que l’organisme légataire ou donataire ne satisfait pas aux conditions légales exigées pour avoir la capacité juridique à recevoir des libéralités ou qu’il n’est pas apte à utiliser la libéralité conformément à son objet statutaire, il peut former opposition à la libéralité, dans des conditions précisées par décret, la privant ainsi d’effet.
Le troisième alinéa n’est pas applicable aux dispositions entre vifs ou par testament au profit des associations et fondations reconnues d’utilité publique, des associations dont la mission a été reconnue d’utilité publique et des fondations relevant des articles 80 à 88 du code civil local applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.
III. – Les libéralités consenties à des Etats étrangers ou à des établissements étrangers habilités par leur droit national à recevoir des libéralités sont acceptées librement par ces Etats ou par ces établissements, sauf opposition formée par l’autorité compétente, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat ».
Héritiers désignés par le de cujus au sein de son testament
Principe : liberté de choix
Chacun est libre de disposer de son patrimoine dans la limite d’une partie protégée au bénéfice des enfants -et du conjoint survivant en l’absence d’enfants- appelée réserve successorale (Article 912 du code civil). La partie dont le défunt aura pu disposer librement est appelée « quotité disponible ».
En savoir plus sur le calcul de la quotité disponible et de la réserve héréditaire« La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent.
La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités ».
Il n’existe cependant aucune limite à la ventilation de la quotité disponible qui peut être dévolue par donation ou legs testamentaire. Les co-bénéficiaires d’un même legs sont en indivision sur le ou les biens légués.
En savoir plus sur les droits du conjoint survivantQuels sont les légataires pouvant se trouver en indivision avec des héritiers ?
Selon le premier alinéa de l’article 1002 du Code civil, « Les dispositions testamentaires sont ou universelles, ou à titre universel, ou à titre particulier ». On distingue ainsi 3 types de legs.
Le legs universel
Le legs universel est la disposition testamentaire par laquelle le testateur dispose au profit d’une ou plusieurs personnes de l’universalité des biens qu’il laissera à son décès (article 1003 du Code civil).
« Le legs universel est la disposition testamentaire par laquelle le testateur donne à une ou plusieurs personnes l’universalité des biens qu’il laissera à son décès. »
Le critère pour qualifier un legs universel est « la vocation au tout ».
Le legs à titre universel
Le legs à titre universel est le celui par lequel le testateur lègue une quote-part des biens dont la loi lui permet de disposer (premier alinéa de l’article 1010 du Code civil).
« Le legs à titre universel est celui par lequel le testateur lègue une quote-part des biens dont la loi lui permet de disposer, telle qu’une moitié, un tiers, ou tous ses immeubles, ou tout son mobilier, ou une quotité fixe de tous ses immeubles ou de tout son mobilier. »
Exemples : – la moitié ou le tiers de son patrimoine, – tous ses immeubles, – tout son mobilier, – une quotité de tous ses immeubles ou de son mobilier, – l’usufruit de la totalité de la succession, etc. |
Ce type de legs ne vise pas des biens déterminés (legs particulier) mais une quotité indéterminée de biens.
Le legs particulier ou à titre particulier
Aux termes d’un legs particulier, le testateur transmet des biens déterminé ou au moins déterminable, conformément au second alinéa de l’article 1010 du Code civil qui précise que « Tout autre legs ne forme qu’une disposition à titre particulier ».
Exemple : legs de tous les biens du défunt situés en France. |
« Tout autre legs ne forme qu’une disposition à titre particulier ».
Héritiers et légataires
Indivision possible entre héritiers et légataires à titre universel ou particulier ou à titre particulier
Les légataires particuliers ou à titre particulier et à titre universel ne se voyant attribuer qu’une partie des biens de la succession, ils ne possèdent pas de droits sur le reste des effets de la succession. Dès lors, une fois que leur legs est délivré et que celui-ci n’empiète pas sur la réserve des héritiers réservataires, ces deux types de légataires sont satisfaits dans leurs droits.
Leur sort quant à l’existence d’une indivision diffère cependant.
- Les légataires particuliers ou à titre particulier :
- ne sont pas en situation d’indivision quand ils ont souvent reçu un bien divis, isolé, individualisé sur lequel ils ne rentrent pas en concurrence avec d’autres héritiers ou légataires, c’est le cas le plus fréquent,
- sont en indivision que lorsque le testeur choisit de léguer un bien en particulier à plusieurs personnes concurremment,
- Les légataires à titre universel :
- au contraire ne recevant qu’un quote-part de biens, ils sont plus fréquemment confrontés à une indivision,
- Il en est autrement lorsque cette quote-part représente une masse distincte, individualisable : « intégralité des immeubles », « tous mes comptes bancaires », etc.
Absence d’indivision en présence d’un légataire universel ?
La qualification du legs universel sur l’existence ou l’absence d’une indivision
Indivision entre légataire et héritier ?
La « concurrence » est plus forte entre héritiers et légataires universels puisque ces derniers ont théoriquement vocation à recevoir l’universalité des biens successoraux. La présence de legs universel est même un changement de paradigme total pour les héritiers qui peuvent ainsi totalement perdre leurs droits à recueillir la succession en nature. Leur réserve peut en effet être satisfaite par un paiement uniquement financier. La rédaction du testament doit cependant être précisément étudiée avant de parvenir à cette conclusion. Ce débat, aussi fourni que classique, est l’un des vecteurs de contentieux technique les plus importants en droit des successions.
En savoir plus sur le legs universelUne fois le legs universel précisément qualifié, le légataire entre en concurrence financière avec les héritiers. Il n’existe cependant entre eux aucune indivision (Cass. 1ère, 11 mai 2016, n°14-16967). Cela signifie notamment que les héritiers ne disposent plus de pouvoirs directs sur les biens de la succession.
En savoir plus sur la réserve héréditaireIndivision entre légataires universels ?
Si plusieurs légataires universels sont désignés, ils se retrouveront entre eux dans une situation d’indivision soumise exactement au même régime que les indivisions ab intestat des articles 815 et suivants du code civil sauf évidemment le jeu de dispositions testamentaires complémentaires.
Le pouvoir des héritiers en l’absence d’indivision
Les héritiers conservent un certain pouvoir de contrôle sur le sort des biens malgré l’omnipotence théorique des légataires universels.
Ce pouvoir peut s’exercer directement par l’héritier auprès du Notaire ou du légataire universel : estimation des biens, modalités de cession etc.
Il peut également s’exercer indirectement : malgré l’absence d’indivision entre les légataires universels et les héritiers, la désignation d’un mandataire successoral est possible. En effet la Cour de cassation est récemment venue préciser que la désignation d’un mandataire successoral peut tout à fait être envisagée en l’absence d’indivision au motif notamment que l’article 813-1 du code civil n’était pas exclusivement réservé aux indivisions, et qu’il avait vocation à s’appliquer à toute succession (Cass. Civ. 1ère, 17 octobre 2019 n°18-23.409).
En savoir plus sur la désignation d'un mandataire successoralDonataires
De son vivant, le de cujus peut avoir donné un bien concurremment à plusieurs personnes (appelées « donataires »), héritiers présomptifs ou pas. Ces donataires se trouvent alors en situation d’indivision dès l’acceptation de la donation.
Dès lors, bien que la nature juridique de l’indivision née de la donation soit strictement similaire, son origine ne se trouve pas dans le décès de leur auteur. Les éventuelles procédures judiciaires menées au sein d’indivisions successorales ou d’indivision nées de donations doivent donc être articulées avec attention car elles ne seront pas systématiquement menées de front dans le cadre d’instances uniques.
C’est la nature de la demande judiciaire qui dictera le choix de la procédure. Elle doit être étudiée avec attention avec votre avocat spécialisé en droit des successions. Par exemple :
- une demande de sortie d’indivision née d’une donation pourra être menée séparément du traitement de la succession devant le tribunal judiciaire,
- une demande de rapport de la même donation devra être jugée conjointement avec la succession,
- Etc.
Quels sont les biens indivis ?
Tous les biens existant (on parle d’actif successoral « existant » pour tous les biens dont le défunt était encore propriétaire au jour de son décès, par opposition aux biens « réintégrés » ou « rapportés » à la succession) dans le patrimoine du de cujus au jour de son décès intègre la masse successorale susceptible de se trouver en situation d’indivision entre les héritiers.
En savoir plus sur le mécanisme du rapportBiens immobiliers indivis
Détermination des biens immobiliers indivis
L’indivision immobilière (appartement, maison, immeuble ou terrain) n’est pas la plus fréquente des formes d’indivision. Elle est pourtant la plus exposée judiciairement en raison de la rigidité qu’elle suppose. Au demeurant, les actions judiciaires sont devenues moins systématiquement obligatoires pour gérer une indivision, la loi offrant aujourd’hui des outils intéressants et sous-exploités.
L’indivision immobilière peut porter sur une variété importante de droits dits « réels » :
- pleine propriété d’un bien individualisé détenu par le défunt seul,
- pleine propriété d’un bien détenu avec un conjoint,
- pleine propriété d’une quote part de bien elle-même indivise lorsque le défunt était lui-même indivisaire en raison d’une succession d’un ascendant non partagé,
- nue-propriété,
- usufruit.
Toutes ces situations sont régies par les articles 815 et suivants du code civil mais répondent à des logiques très différentes. La question de la sortie de l’indivision, du partage est notamment traitée très différemment selon la sous-catégorie d’indivision immobilière.
En savoir plus sur l'indivision immobilière« Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention ».
Actes particuliers relatifs aux biens immobiliers indivis successoraux
L’attestation de propriété ou attestation immobilière
L’attestation de propriété (ou immobilière) est un acte dressé obligatoirement par Notaire. Elle atteste que les biens immobiliers du défunt ont été transmis à ses héritiers et sont désormais leur propriété. L’attestation désigne précisément le bien, le nom et la qualité des nouveaux propriétaires indivis.
Cette attestation a un coût qui s’ajoute aux droits de succession. Ces frais ne sont pas fixes mais calculés en fonction de la valeur des biens immobiliers transmis, objet de l’acte.
En savoir plus sur les droits de successionL’attestation de propriété immobilière est (article 29 (alinéa 4) du décret n°55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière):
- facultative si un partage portant sur la totalité des immeubles transmis par le défunt est réalisé dans les dix mois du décès (l’acte de partage faisant office de titres de propriété) ;
- obligatoire si aucun partage portant sur la totalité des immeubles transmis par le défunt est réalisé dans les dix mois du décès.
« Il n’est pas établi d’attestation notariée si un acte de partage portant sur la totalité des immeubles héréditaires est dressé et publié dans les dix mois du décès ».
L’acte notarié est publié aux Services de Publicité foncière.
L’acte de partage
Dans le cadre du règlement d’une succession, l’attribution d’un bien immobilier indivis à un héritier et/ou légataire devra obligatoirement être inscrite au sein d’un acte de partage qui sera publié auprès des Services de Publicité foncière.
A défaut, les autres héritiers et/ou légataires indivisaires sont toujours considérés comme propriétaires puisqu’en matière immobilière, seul un acte notarié, ensuite publié auprès des Services de Publicité foncière, peut acter d’une mutation immobilière.
En savoir plus sur les frais liés au partage de la successionBiens meubles indivis
Parts de sociétés
Les parts de sociétés dont était détenteur le défunt au jour de son décès intègrent son patrimoine successoral. Ses héritiers et ayants droits peuvent donc se retrouver en indivision sur des titres sociaux.
Il y a lieu de distinguer deux situations juridiques distinctes :
- les indivisaires « associés » qui détiennent des parts sociales de sociétés de personnes (SCI, SARL, etc.) ;
- les indivisaires « actionnaires » qui détiennent des actions de société de capitaux (SA, SAS, etc.).
Transmission de la qualité d’associé ou d’actionnaire des héritiers et ayant-droits indivis
L’indivision successorale n’ayant pas de personnalité juridique propre, elle ne sera pas considérée comme le nouvel associé ou le nouvel actionnaire. Chaque héritier et ayant droit sera titulaire de manière indivise des parts sociales et des actions des sociétés anciennement détenues par le défunt.
La lecture des statuts est déterminante de la transmission de la qualité d’actionnaire ou d’associé. Le plus souvent, les sociétés accordent automatiquement le statut d’associé ou d’actionnaire aux héritiers. Certains statuts obligent les héritiers ou ayants droits à solliciter auprès de la société un agrément dont la procédure peut varier. Ainsi, il est nécessaire que les héritiers et ayants droits puissent obtenir rapidement les statuts de la société dans laquelle le défunt possédait des parts sociales et/ou actions afin pouvoir faire le cas échéant solliciter un agrément.
Parts sociales indivises et voix unique au sein de la société
Les héritiers et ayant-droits indivis viennent en représentation du défunt associé / actionnaire. Ils doivent agir d’un commun accord pour faire valoir une seule voix auprès de la société. Au demeurant, l’unanimité ne suffit formellement pas à exercer le droit de vote en assemblée générale. La loi, le plus souvent reprise par les statuts, contraint les indivisaires à désigner un mandataire unique parmi eux ou en désignant un tiers.
En cas de conflit, les indivisaires ont la possibilité de solliciter la désignation dudit mandataire devant un tribunal. Celui-ci aura de la même manière pour rôle de représenter l’indivision successorale lors des assemblées générales de la société.
En savoir plus sur la désignation d'un mandataire successoralDroits individuels des héritiers et ayants droits associés ou actionnaires indivis
Si l’indivision successorale doit agir d’une seule voix dans le cadre des parts sociales et actions indivises, chaque héritier et ayants droits indivis possède des droits qu’il peut exercer individuellement sans nécessité l’accord de ses co-indivisaires :
- droit de participer aux assemblées générales : la société doit ainsi convoquer tous les héritiers et ayants droits indivis) ;
- droit d’information : chaque héritier et ayants droits dispose de la faculté de consulter les informations relatives à la société ;
- droit d’interroger le gérant ou le président de la société ;
- droit d’obtenir les documents sociaux (procès-verbaux, résolutions proposées, etc.).
En cas de désaccord entre indivisaires, lorsque l’un d’eux est gérant, lorsqu’une majorité est abusivement dominante ou au contraire en présence d’une minorité bloquante, une bonne compréhension des mécanismes sociétaux se révèle indispensable pour débloquer une succession ou rééquilibrer les pouvoirs à l’intérieur d’une société indivise.
Ces outils, largement sous-exploités, doivent être évoqués avec attention avec l’avocat chargé du règlement de la succession car ils dépendent de juridictions différentes de celles chargées du règlement de la succession qu’il s’agisse de SCI ou de sociétés commerciales. Il faut donc penser avec soin l’articulation entre ces différentes procédures pour qu’elles ne se parasitent pas réciproquement ou qu’au contraire, elles puissent en éviter la multiplication inutile.
En savoir plus sur la gestion des sociétés dans la successionComptes bancaires
Sort du compte bancaire indivis selon sa nature
Compte individuel
- Blocage du compte dès la connaissance du décès
Les établissements bancaires au sein desquels le défunt détenait des comptes bancaires doivent être informés du décès de ce dernier. Ils procèderont à leur blocage, empêchant toute opération de dépôt ou de retrait et supprimant l’effet des procurations préexistantes. Cette mesure intègre l’arsenal courant des mesures conservatoires appartenant aux héritiers pour garantir l’intégrité de la succession.
Le compte est ensuite bloqué alternativement :
- jusqu’au règlement amiable ou judiciaire de la succession,
- jusqu’à un accord des héritiers pour un partage partiel,
- jusqu’à un partage judiciaire par provision,
- jusqu’à une autorisation judiciaire d’utiliser les fonds pour garantir la conservation ou assurer la bonne gestion de biens indivis.
- Possibilité de transférer les fonds chez le Notaire chargé de la succession
Néanmoins sur autorisation des héritiers, le Notaire peut demander le rapatriement des fonds à son étude pour permettre à la succession de disposer d’une trésorerie suffisante pour faire face aux premières charges et faciliter les opérations de partage. Les fonds rapatriés chez le Notaire seront ensuite partagés entre les héritiers et ayants droits.
Ce transfert des fonds est cependant moins bénin qu’il n’y paraît notamment en présence de comptes-titres, de produits d’épargne et de défiscalisation. Leur déblocage irraisonné peut entraîner des surcoûts ou des dysfonctionnements qui doivent être anticipés. La composition du patrimoine successoral doit donc être globalement analysée avant d’autoriser la vente des titres ou la fermeture de certains produits bancaires par le Notaire.
Dans cette perspective, il convient de ne pas signer trop rapidement l’acte de notoriété proposé par le Notaire qui contiendra souvent une autorisation faite à ce dernier de faire vendre et de liquider les titres et sous-jacents financiers détenus en banque. Une rédaction plus adaptée peut être discutée avec le Notaire et les co-héritiers.
En savoir plus sur la rédaction et le rôle de l'acte de notoriété- L’accès aux fonds successoraux dans la limite de 5.000€
Les héritiers peuvent toutefois, malgré le blocage, avoir accès aux fonds détenus sur le compte individuel du défunt dans certaines conditions définies à l’article L312-1-4 du Code monétaire et financier.
En savoir plus sur les conditions d'accès aux fonds successoraux dans la limite de 5000€« La personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles du défunt peut obtenir, sur présentation de la facture des obsèques, le débit sur les comptes de paiement du défunt, dans la limite du solde créditeur de ces comptes, des sommes nécessaires au paiement de tout ou partie des frais funéraires, auprès des banques teneuses desdits comptes, dans la limite d’un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l’économie.
Sous réserve de justifier de sa qualité d’héritier, tout successible en ligne directe peut :
1° Obtenir, sur présentation des factures, du bon de commande des obsèques ou des avis d’imposition, le débit sur les comptes de paiement du défunt, dans la limite des soldes créditeurs de ces comptes, des sommes nécessaires au paiement de tout ou partie des actes conservatoires, au sens du 1° de l’article 784 du code civil, auprès des établissements de crédit teneurs desdits comptes, dans la limite d’un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l’économie ;
2° Obtenir la clôture des comptes du défunt et le versement des sommes y figurant, dès lors que le montant total des sommes détenues par l’établissement est inférieur à un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l’économie.
Pour l’application des 1° et 2°, l’héritier justifie de sa qualité d’héritier auprès de l’établissement de crédit teneur desdits comptes soit par la production d’un acte de notoriété, soit par la production d’une attestation signée de l’ensemble des héritiers, par lequel ils attestent :
a) Qu’il n’existe pas de testament ni d’autres héritiers du défunt ;
b) Qu’il n’existe pas de contrat de mariage ;
c) Qu’ils autorisent le porteur du document à percevoir pour leur compte les sommes figurant sur les comptes du défunt ou à clôturer ces derniers ;
d) Qu’il n’y a ni procès, ni contestation en cours concernant la qualité d’héritier ou la composition de la succession.
Pour l’application du présent 2°, l’attestation mentionnée au cinquième alinéa doit également préciser que la succession ne comporte aucun bien immobilier.
Lorsque l’héritier produit l’attestation mentionnée au cinquième alinéa, il remet à l’établissement de crédit teneur des comptes :
– son extrait d’acte de naissance ;
– un extrait d’acte de naissance du défunt et une copie intégrale de son acte de décès ;
– le cas échéant, un extrait d’acte de mariage du défunt ;
– les extraits d’actes de naissance de chaque ayant droit désigné dans l’attestation susmentionnée ;
– un certificat d’absence d’inscription de dispositions de dernières volontés. »
Condition n°1 : justification de la qualité d’héritier
Le code monétaire et financier restreint cet accès exceptionnel aux seuls héritiers. Toute personne voulant accéder aux fonds du défunt doit donc justifier sa qualité d’héritier auprès de l’établissement bancaire concerné.
En savoir plus sur les héritiers de la successionA cette fin, il peut produire :
- soit un acte de notoriété ;
- soit la production d’une attestation, signée de l’ensemble des héritiers, indiquant :
« a) Qu’il n’existe pas de testament ni d’autres héritiers du défunt ;
b) Qu’il n’existe pas de contrat de mariage ;
c) Qu’ils autorisent le porteur du document à percevoir pour leur compte les sommes figurant sur les comptes du défunt ou à clôturer ces derniers ;
d) Qu’il n’y a ni procès, ni contestation en cours concernant la qualité d’héritier ou la composition de la succession ».
L’héritier doit joindre :
- son extrait d’acte de naissance ;
- un extrait d’acte de naissance du défunt et une copie intégrale de son acte de décès ;
- le cas échéant, un extrait d’acte de mariage du défunt ;
- les extraits d’actes de naissance de chaque ayant droit désigné dans l’attestation susmentionnée ;
- un certificat d’absence d’inscription de dispositions de dernières volontés.
Condition n°2 : nature des démarches autorisées
- Le paiement des frais funéraires
Les frais funéraires peuvent être débités du compte du défunt, sur présentation de la facture, dans la double limite du solde créditeur dudit compte et d’un montant de 5.000€.
Cette possibilité est ouverte aux héritiers en ligne directe et à la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles du défunt.
En savoir plus sur les héritiers de la succession En savoir plus sur la désignation d'un chargé de funérailles- Le paiement des démarches conservatoires
Les héritiers ou tout successible en ligne directe, autrement dit tout ascendant ou descendant, peut aussi obtenir, sur présentation des factures, le paiement via les comptes du défunt, de tout ou partie des actes conservatoires, toujours dans la limite de 5.000€.
Les actes concernés sont définis strictement par renvoi au 1° de l’article 784 du code civil : « Le paiement des frais funéraires et de dernière maladie, des impôts dus par le défunt, des loyers et autres dettes successorales dont le règlement est urgent ».
« Le paiement des frais funéraires et de dernière maladie, des impôts dus par le défunt, des loyers et autres dettes successorales dont le règlement est urgent ».
Ces paiements se font toujours dans la limite des soldes créditeurs de ces comptes.
- La clôture des comptes
Les héritiers peuvent aussi obtenir la clôture des comptes du défunt et le versement à leur bénéfice des sommes y figurant, dès lors que le montant total des sommes détenues par l’établissement est inférieur à 5.000€.
Ce seuil est propre à chaque établissement. La formalité peut donc être renouvelée dès lors que chaque banque ne détient que 5.000€.
Pour la clôture de tout compte, l’héritier concerné doit produire une attestation signée de l’ensemble des héritiers, indiquant :
« a) Qu’il n’existe pas de testament ni d’autres héritiers du défunt ;
b) Qu’il n’existe pas de contrat de mariage ;
c) Qu’ils autorisent le porteur du document à percevoir pour leur compte les sommes figurant sur les comptes du défunt ou à clôturer ces derniers ;
d) Qu’il n’y a ni procès, ni contestation en cours concernant la qualité d’héritier ou la composition de la succession
e) Que la succession ne comporte aucun bien immobilier ».
- Droit aux relevés de comptes du défunt
L’article 724 du Code civil dispose que les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt. La « saisie » désigne ici le transfert de propriété juridique (et pas matériel) des biens. Pour les légataires, ces derniers en sont saisis à partir – si besoin- de la délivrance de leurs legs.
En savoir plus sur la délivrance des legs« Les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.
Les légataires et donataires universels sont saisis dans les conditions prévues au titre II du présent livre.
A leur défaut, la succession est acquise à l’Etat, qui doit se faire envoyer en possession ».
Sur ce fondement, les héritiers qui représentent juridiquement la personne décédée ont le droit d’obtenir copie des relevés de comptes du défunt sans que puisse leur être opposé le secret bancaire. Les banques ont l’obligation de conserver les documents pendant dix années (article L.123-22 du Code de commerce).
« Les documents comptables sont établis en euros et en langue française.
Les documents comptables et les pièces justificatives sont conservés pendant dix ans.
Les documents comptables relatifs à l’enregistrement des opérations et à l’inventaire sont établis et tenus sans blanc ni altération d’aucune sorte, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat. »
La justification de l’hérédité est évidemment obligatoire auprès de la banque.
Ce service de copie des relevés des comptes est généralement facturé par les établissements bancaires.
L’analyse des relevés de comptes peut permettre de découvrir des dons reçus par un héritier et qu’il aurait dissimulé : dans un tel cas, ce dernier pourrait être poursuivi pour recel successoral, peine civile qui prive l’héritier receleur de ses droits sur les biens recelés.
En savoir plus sur le recel successoralLes relevés peuvent également servir à liquider le régime matrimonial du défunt par exemple en déterminant avec précision le remboursement d’un emprunt immobilier. Ils servent de manière générale à retracer tous les mouvements financiers intervenus entre époux ou à l’égard des héritiers.
Bon à savoir : cette représentation juridique du défunt par ses héritiers ne se limite pas à l’obtention de ses relevés de comptes et s’étend également à son dossier médical (article L.110-4 du Code de la santé publique). |
Les comptes joints et indivis
Il convient de distinguer les comptes joints (dont l’intitulé mentionne « ou ») et les comptes indivis (dont l’intitulé mentionne « et »). Leur appellation bancaire a de fortes conséquences en cas de décès de l’un des titulaires.
- Compte joint
Utilisation du compte postérieurement au décès
Le devenir d’un compte joint au décès d’un de ses titulaires est précisé dans la convention de compte conclue avec l’établissement bancaire.
Deux dispositions sont classiquement prévues en cas de décès :
- le compte n’est pas bloqué, sauf opposition des héritiers du cotitulaire défunt ;
- le compte continue à être le compte des cotitulaires survivants (ou devient automatiquement un compte bancaire individuel, s’il n’y a plus qu’un cotitulaire survivant).
Sort des fonds du compte joint
Le compte étant joint, la question de la détermination et du sort de la part appartenant au défunt fait partie du règlement général de la succession.
Le Notaire devra déterminer la part du solde du compte intégrant la succession ; au besoin en demandant la régularisation de mouvements suspects ou abusifs. Une étude attentive du financement du compte bancaire peut augmenter / diminuer la part devant revenir à la succession et/ou permettre de déterminer des créances tant à l’égard du cotitulaire qu’à l’égard du défunt (et qui seraient donc dues par sa succession).
A défaut de preuve contraire, les fonds versés sur un compte joint sont présumés appartenir par parts viriles à chacun des titulaires (par moitié en présence de deux titulaires, par tiers en présence de trois titulaires, etc.).
- Compte indivis
Utilisation du compte postérieurement au décès
Dès que la banque a connaissance de façon certaine du décès d’un cotitulaire (par les proches ou par un notaire), le compte indivis sera bloqué : aucune opération de dépôt ou de retrait ne pourra avoir lieu.
Cette immobilisation ne connaît pas d’exception même en présence d’un mandataire et peu importe le lien entre le défunt et le cotitulaire du compte.
Sort des fonds du compte indivis
Dans le cadre du règlement de la succession d’un des titulaires, la part des fonds indivis devant intégrer l’actif successoral devra être déterminée.
Le Notaire devra déterminer la part du solde du compte intégrant la succession ; au besoin en demandant la régularisation de mouvements suspects ou abusifs. Une étude attentive du financement du compte bancaire peut augmenter / diminuer la part devant revenir à la succession et/ou permettre de déterminer des créances tant à l’égard du cotitulaire qu’à l’égard du défunt (et qui seraient donc dues par sa succession).
A défaut de preuve contraire, les fonds versés sur un compte indivis sont présumés appartenir par parts viriles à chacun des titulaires (par moitié en présence de deux titulaires, par tiers en présence de trois titulaires, etc.).
Comptes titres
Information du décès
Au même titre que pour des comptes courants, les établissements concernés doivent être informés du décès du titulaire des comptes titres.
Sort des comptes titres
Il est possible de vendre les titres dont le défunt était propriétaire à condition que tous les héritiers soient d’accord et signent l’ordre de vente. Ainsi le Notaire peut ordonner la vente des titres dont la valeur est inférieure ou égale à 15 000€ si tous les héritiers ont donné leur accord.
Sort du coffre bancaire
Si le défunt détenait un coffre, celui-ci est bloqué en même temps que les comptes bancaires du défunt et aucun héritier ne peut en retirer le contenu. Les héritiers ne peuvent accéder seuls au contenu du coffre et ces derniers doivent être tous présents et/ou représentés pour une telle opération.
Lors de l’ouverture de la succession, le Notaire chargé de son règlement organisera un inventaire du contenu du coffre.
Les prêts en cours
Sauf fonctionnement d’une assurance-décès, les prêts du défunt et les prélèvements continuent à courir. Les héritiers doivent donc veiller au provisionnement du compte prélevé.
Le capital restant dû au décès est porté au passif de la succession.
En savoir plus sur la déduction du passif de la successionQuels sont les biens exclus de l’indivision ?
Biens donnés
De son vivant, le défunt a pu disposer de son patrimoine et procéder à des donations de ses biens soit à ses héritiers soit à des tiers. Ces biens ayant été volontairement sortis de son patrimoine par le défunt, le décès de ce dernier ne peut avoir pour effet de créer une indivision entre le donataire et les héritiers et ayants droits de la succession.
Si le décès n’a pas de conséquences sur la titularité du bien donné, il ne faut pas oublier que les donations réalisées seront fictivement considérées afin de vérifier que le défunt a respecté la réserve héréditaire. Cette « réserve » correspond à la part de la succession réservée à certains héritiers dont le défunt ne peut disposer librement, contrairement à la quotité disponible qui correspond à la part de son patrimoine qu’il peut donner, léguer librement. En cas de dépassement de la réserve héréditaire, la donation pourra être réduite et le donataire ainsi soumis au paiement d’une indemnité de réduction envers la succession.
En savoir plus sur le respect de la réserve et l'action en réductionBiens préalablement démembrés
Définition du démembrement
Le droit de propriété recouvre plusieurs attributs : occupation du bien (usus), perception des revenus (fructus) et possibilité de disposer du bien, de le vendre, etc. (abusus). Si ces attributs sont généralement détenus par un seul et même propriétaire, ils peuvent également être répartis entre plusieurs personnes le ou les usufruitiers et le ou les nus-propriétaires. On parle alors de démembrement de propriété.
L’usufruitier disposera des attributs d’usus et de fructus : il pourra ainsi occuper le bien sans verser de loyer, en percevoir les revenus s’il décide de le louer et de manière générale le gérer jusqu’à son décès ou jusqu’au terme arrêté si son usufruit est temporaire.
De son côté, le nu-propriétaire disposera de l’abusus : s’il ne peut jouir du bien, c’est lui qui possédera à terme la propriété pleine et entière du bien. Il a surtout vocation à attendre mais il n’est pour autant pas exempt de droits à faire valoir contre l’usufruitier.
Relations entre usufruitier et nu-propriétaire
Absence d’indivision entre usufruitier et nu-propriétaire
Il n’existe aucune indivision entre l’usufruitier et le nu-propriétaire. La jurisprudence de la Cour de cassation est très constante sur ce point (Civ. 3e, 7 juill. 1993, no 92-19.193).
Les relations entre usufruitier et nu-propriétaire ne sont donc pas régies par les règles de l’indivision. Elles répondent à des dispositions spécifiques au démembrement de propriété prévues aux articles 578 et suivants du Code civil.
« L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance ».
La première conséquence, la plus évidente et la plus impactante est qu’usufruitier et nu-propriétaire n’ont aucun droit inaliénable à sortir du démembrement de propriété contrairement à celui octroyé aux indivisaires par l’article 815 du code civil.
« Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention ».
Indivisions possibles en cas de démembrement
Si le démembrement n’est pas en soi une indivision, les deux situations juridiques ne sont pas incompatibles. En effet, dans le cas d’un bien démembré, des situations d’indivisions peuvent exister :
- entre plusieurs usufruitiers (article 815-18 alinéa 1 du Code civil) ;
- entre plusieurs nus-propriétaires (article 818 du Code civil qui y fait référence).
Dans de tels cas, les règles relatives à l’indivision classique s’appliquent entre les différentes usufruitiers d’un côté et les différents nus-propriétaires de l’autre, avec quelques règles spécifiques pour les usufruitiers.
En savoir plus sur l'usufruit« Les dispositions des articles 815 à 815-17 sont applicables aux indivisions en usufruit en tant qu’elles sont compatibles avec les règles de l’usufruit »
« La même faculté appartient à l’indivisaire en nue-propriété pour la nue-propriété indivise. En cas de licitation de la pleine propriété, le deuxième alinéa de l’article 815-5 est applicable ».
Sauf exceptions, l’usufruit s’éteignant au décès du de cujus, aucun bien grevé d’un usufruit seul n’intégrera la masse d’exercice de la succession.
En revanche, la succession peut fréquemment contenir une nue-propriété :
- si le défunt était lui-même en indivision sur la nue-propriété d’un bien : sa part de nue-propriété intégrera alors son patrimoine successorale ;
- si le conjoint survivant opte pour l’usufruit de la succession.
Assurance-vie
Principe d’exclusion du patrimoine successoral
Les assurances-vie n’intègrent pas en principe le patrimoine successoral et ne sont pas considérées dans le patrimoine reconstitué, conformément aux dispositions de l’article L.132-13 du Code des assurances.
En savoir plus sur l'exclusion de l'assurance-vie du patrimoine successoral« Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.
Ces règles ne s’appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n’aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ».
Dès lors, si plusieurs personnes ont été désignées bénéficiaires des assurances-vie du défunt, chacun se verra verser la quote-part correspondant à ses droits et aucune indivision n’existera entre les bénéficiaires du contrat d’assurance-vie et les héritiers sur les fonds anciennement détenus sur ledit contrat.
Exceptions : réintégration dans le patrimoine successoral indivis
Si les assurances-vie n’intègrent pas par principe le patrimoine successoral, la loi puis la jurisprudence, dans un objectif de protection de la réserve héréditaire, ont prévu un double mécanisme de retraitement des contrats d’assurance-vie.
En savoir plus sur la protection de la réserve héréditaireCe double mécanisme peut permettre aux primes d’intégrer la masse successorale et donc qu’elles soient soumises à l’indivision entre les héritiers jusqu’au partage :
- la réintégration des primes manifestement exagérées : l’article L132-13 du code des assurances fonde le principe selon lequel les primes qui sont « manifestement exagérées eu égard aux facultés du souscripteur » sont soumises aux règles du rapport à la succession et de la réduction pour atteinte à la réserve héréditaire ;
« Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.
Ces règles ne s’appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n’aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ».
- la requalification des contrats d’assurance-vie en donation : le placement sur un contrat assurance-vie peut être requalifié en donation si les circonstances de ce placement et celles dans lesquelles son bénéficiaire a été désigné, révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller des fonds de manière irrévocable. C’est là aussi la jurisprudence qui est venue déterminer les critères pour envisager une telle requalification et ainsi permettre une réintégration dans l’actif successoral.
Il est précisé que l’indivision peut alors intervenir entre les héritiers sur les fonds réintégrés. Ces deux mécanismes ne génèrent pas d’indivision entre les bénéficiaires des assurances-vie et les héritiers.
Tontine
Définition
La tontine, aussi appelée « clause d’accroissement », est une convention entre plusieurs personnes aux termes de laquelle elles acquièrent ensemble un bien qui sera réputé avoir été acquis uniquement par le survivant d’entre elles.
Absence d’indivision entre les acquéreurs du bien
Chaque acquéreur est propriétaire du bien sous une double condition :
- d’une part sous condition résolutoire de son prédécès,
- d’autre part, sous condition suspensive de sa survie.
Tant que le pacte n’est pas dénoué, il n’existe pas d’indivision en propriété entre les parties. Chacun est propriétaire de la totalité sous condition de sa survie.
Absence d’intégration du bien acquis en tontine dans la succession du premier acquéreur défunt
Cet « artifice » juridique a une conséquence importante : le bien est censé n’avoir jamais fait partie du patrimoine du défunt s’il n’est le dernier des tontiniers. Il n’y a pas transmission entre le défunt et le survivant, si bien que le bien ne fait pas partie de la succession et échappe aux règles de la réserve héréditaire (la part de patrimoine réservé aux enfants). Les fonds précédemment versés par les tontiniers morts en premiers sont perdus.
Il n’existe dès lors aucune indivision entre le tontinier survivant et les héritiers du défunt qui ne possèdent ainsi aucun droit sur le bien concerné.
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