Jurisprudences
Divorce – Le syndrome anxiodépressif est un dommage d’une particulière gravité résultant de la dissolution du mariage
Cass. civ. 1ère, 22 juin 2022, 20-21.201
Divorce – Séparation de corps
Enseignement de l'arrêt
Le fait pour une épouse de souffrir plusieurs années après le départ de son mari du domicile conjugal d’un syndrome anxiodépressif réactionnel est une conséquence d’une particulière gravité que celle-ci a subie du fait de la dissolution du mariage justifiant l’attribution de dommages et intérêts prévus par l’article 266 du code civil.
La possibilité d’obtenir des dommages et intérêts
Un principe clairement énoncé
En vertu de l’article 266 du code civil : « Quand le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l’un des époux, celui-ci peut être condamné à des dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel ou moral que la dissolution du mariage fait subir à son conjoint.
Ce dernier ne peut demander des dommages-intérêts qu’à l’occasion de l’action en divorce. »
Cet article permet donc à un époux de demander des dommages et intérêts à l’autre époux pour les dommages causés par le fait même de la dissolution du mariage. Il ne s’agit donc pas d’indemniser les dommages subis au cours du mariage.
Une mise en pratique compliquée
La mise en pratique de cet article reste toutefois complexe et subordonnée à deux grandes conditions.
Tout d’abord, l’article 266 du code civil ne concerne que deux cas de divorce :
- le divorce pour faute aux torts exclusifs d’un époux,
- le divorce pour altération définitive du lien conjugal, mais seulement au profit du défendeur à condition qu’il n’ait lui-même formé aucune demande reconventionnelle en divorce.
Ensuite, cela ne concerne que certains dommages : ceux d’une particulière gravité et qui résultent de la dissolution du mariage.
Le syndrome anxiodépressif : un dommage d’une particulière gravité résultant de la dissolution du mariage
Rappel des faits
En l’espèce, un jugement de divorce prononce le divorce des époux aux torts exclusifs du mari en 2020.
L’époux est condamné à des dommages et intérêts au titre de l’article 266 du code civil en première instance et confirmé en appel.
Dans son pourvoi ce dernier fait grief à l’arrêt de le condamner au paiement de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 266 du code civil, alors « que des dommages et intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des conséquences d’une particulière gravité qu’il subit du fait de la dissolution du mariage ; qu’en condamnant Monsieur sans caractériser de préjudice d’une particulière gravité que Madame aurait subi du fait de la dissolution du mariage, la cour d’appel a violé l’article 266 du code civil. »
Solution de la Cour de cassation
La Cour de cassation, dans un arrêt du 22 juin 2022, énonce : « Ayant relevé que la vie commune avait duré vingt-quatre ans et que Madame souffrait, plusieurs années après le départ de Monsieur du domicile conjugal, d’un syndrome anxio-dépressif réactionnel, la cour d’appel a caractérisé les conséquences d’une particulière gravité que l’épouse avait subies du fait de la dissolution du mariage. »
Pour information, le syndrome anxio-dépressif ou trouble anxieux et dépressif mixte, est un trouble psychiatrique qui combine à la fois les symptômes de la dépression et ceux de l’anxiété.
Les symptômes du syndrome anxio-dépressif sont principalement les suivants :
- fatigue,
- manque de concentration,
- irritabilité,
- troubles du sommeil,
- inquiétude excessive,
- changements dans l’humeur,
- sentiments de tristesse ou d’inutilité,
- perte d’intérêt pour tout ce qu’elle appréciait auparavant,
- incapacité à se détendre,
- symptômes physiques : rythme cardiaque rapide, maux de tête, bouffées de chaleur, sueurs, douleurs abdominales et/ou un essoufflement.
En conclusion, le fait pour une épouse de souffrir plusieurs années après le départ de son mari du domicile conjugal d’un syndrome anxiodépressif réactionnel est une conséquence d’une particulière gravité que celle-ci avait subie du fait de la dissolution du mariage. Cela justifiait l’attribution de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 266 du code civil.
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