Jurisprudences
Patrimoine – Qualification de donation d’une cession à titre gratuit de droits de propriété intellectuelle
TJ Paris, 8 fév. 2022, nº 19-14.142
Anticipations de successions, Patrimoine - Fiscalité
Enseignement de l'arrêt
Une cession à titre gratuit de droits de propriété intellectuelle est qualifiée de donation et doit donc respecter le formalisme d’un acte notarié. A défaut, la cession encourt la nullité.
Faits de l’espèce
Monsieur D et Monsieur O conçoivent des antennes permettant la réception de données de balises placées dans les colliers de chiens de chasse. Dans ce cadre, ils déposent une marque de l’Union européenne « Supra » et des dessins et modèles communautaires.
Ces produits sont commercialisés par deux sociétés dont Monsieur D et Monsieur O sont associés, puis par une société Hermès I dont seul Monsieur O était associé et gérant.
La marque et les modèles sont cédés à la société Hermès I le 13 juillet 2015. Monsieur O concède également à deux autres sociétés une licence sur les modèles cédés à Hermès I.
Par courriel du 28 janvier 2018, Monsieur D – ex-associé de Monsieur O – dénonce la cession des droits de propriété intellectuelle et assigne ce dernier en nullité du contrat de cession.
Position du Tribunal
Devant le Tribunal judiciaire, Monsieur D invoque l’absence de contrepartie financière à la cession et considère que l’acte est une donation qui aurait dû être consentie par acte authentique.
Le Tribunal judiciaire de Paris valide ce raisonnement, en rappelant qu’« aux termes de l’article 931 du code civil, tous actes portant donation entre vifs seront passés devant notaires dans la forme ordinaire des contrats ; et il en restera minute, sous peine de nullité ».
« Tous actes portant donation entre vifs seront passés devant notaires dans la forme ordinaire des contrats ; et il en restera minute, sous peine de nullité »
Il précise également que « deux dérogations à ce formalisme sont admises en jurisprudence, la première tenant aux dons manuels, qui imposent la tradition (c’est-à-dire la remise physique) de la chose donnée, la seconde tenant aux donations déguisées ou indirectes, dont les conditions de forme suivent celles de l’acte dont elles empruntent l’apparence. Le code de la propriété intellectuelle ne déroge pas à cette condition formelle des donations, et prévoit seulement, s’agissant des marques, que le transfert de leur propriété doit être constaté par écrit ».
Dans le cas qui lui est soumis, le Tribunal judiciaire de Paris relève que le contrat daté du 13 juillet 2015 emporte explicitement le transfert de propriété de la marque et des modèles à titre gratuit.
Le Tribunal considère que s’agissant d’une « donation, non dissimulée et portant sur des droits incorporels, comme tels insusceptibles de remise physique », l’acte aurait dû être passé devant Notaire et est donc nul, ayant été conclu sous seing privé.
La juridiction applique donc strictement le formalisme des donations au droit de la propriété intellectuelle.
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