Jurisprudences
Testament olographe non daté et rédigé au dos d’un relevé de compte
Cass. civ. 2e, 22 nov. 2023, n°21-17.524
Liquidation et partage de successions, Anticipations de successions
Enseignement de l'arrêt
La validité du testament non daté par le testateur et rédigé au dos d’un relevé de compte est admise puisqu’il est possible ainsi de le dater par des éléments extrinsèques.
Un testament est un acte juridique écrit par lequel son auteur (appelé le « testateur ») organise sa succession et exprime ses dernières volontés. Pour que le testament soit valable, il est nécessaire que son rédacteur soit sain d’esprit et capable juridiquement.
Le dernier testament en date s’applique.
Le testament peut prendre trois formes : il peut être olographe, authentique ou mystique.
Le testament olographe – qui est le plus courant en France – doit être manuscrit, daté et signé de la main du testateur.
Faits de l’espèce
Madame P décède le 7 octobre 2015 et laisse pour lui succéder ses deux frères S et W.
Un des deux frères se prévaut d’un testament olographe le désignant légataire universel.
Ce testament est rédigé au verso d’un relevé de compte bancaire arrêté au 31 mars 2014 et signé par la de cujus mais non daté.
W assigne son frère en nullité du testament. Il est débouté par la Cour d’appel de Paris.
Position de la Cour de cassation
W (frère non légataire) forme alors un pourvoi au motif que :
- le testament ne comporte – de la main même du testateur – aucun élément indicatif de la date de rédaction et la date figurant sur le support ne remplace pas l’absence de mention manuscrite permettant de dater sa rédaction ;
- en tout état de cause, l’élément intrinsèque contenu dans le testament, en cas d’absence de date, doit être complété par des éléments extrinsèques. Or en l’espèce, aucun élément extrinsèque n’est venu compléter l’élément intrinsèque constitué du verso de l’original d’un relevé bancaire donnant la valorisation d’une épargne au 31 mars 2014.
La Cour de cassation considère :
« en dépit de son absence de date, un testament olographe n’encourt pas la nullité dès lors que des éléments intrinsèques à l’acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu’il a été rédigé au cours d’une période déterminée et qu’il n’est pas démontré qu’au cours de cette période, le testateur ait été frappé d’une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible ».
Elle précise ainsi qu’une date pré-imprimée sur le support utilisé par le testateur pour rédiger son testament olographe peut constituer un élément intrinsèque à celui-ci.
La Cour de cassation considère ainsi que la Cour d’appel a logiquement considéré la validité du testament :
- d’une part, qu’en ayant établi son testament au verso de l’original d’un relevé de banque donnant la valorisation d’une épargne au 31 mars 2014 et en y précisant l’adresse de son domicile, laquelle correspondait à celle figurant sur le relevé ;
- d’autre part, que l’intéressée avait été hospitalisée à compter du 27 mai 2014 jusqu’à son décès, la cour d’appel a estimé, en présence de deux éléments intrinsèques, corroborés par un élément extrinsèque, que le testament avait été écrit entre ces deux dates.
La Cour de cassation confirme ainsi la possibilité de retenir que le testament avait été écrit entre ces deux dates.
La Cour de cassation s’appuie également sur l’absence de démonstration que la testatrice aurait été atteinte d’une incapacité de tester à cette période, pendant laquelle elle n’avait pas pris d’autres dispositions testamentaires.
Le testament n’est donc pas déclaré nul du fait de la seule absence de date certaine.
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